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💭 TĂ©moignages : Covid long, le virus qui laisse des traces

💭 TĂ©moignages : Covid long, le virus qui laisse des traces
Mis Ă  jour le
10 mai 2023
SantĂ© et bien-ĂȘtre
Mis Ă  jour le
10 mai 2023
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Dans cet article

C’est l’histoire d’une maladie qu’aucun scientifique n’avait anticipĂ©e. Pendant le confinement, quand les premiers tĂ©moignages de patients ont Ă©mergĂ© sur les rĂ©seaux sociaux, les mĂ©decins, les autoritĂ©s et les mĂ©dias leur ont prĂȘtĂ© peu d’attention. Sur Facebook et Twitter, des dizaines, puis des centaines, puis des milliers de personnes rapportaient une Ă©trange nouvelle : la Covid-19 ne se guĂ©rit pas en quelques semaines comme on le pensait, mais dans certains cas, perdure pendant de longs mois, revenant toucher les patients par vagues successives. Ces malades se regroupaient autour du hashtag #AprĂšsJ20. Puis le hashtag est devenu #AprĂšsJ40, #AprĂšsJ60, #AprĂšsJ80
etc. Aujourd’hui, le hashtag s’appelle #AprĂšsJ180 et ces patients sont pris trĂšs au sĂ©rieux et Ă©tudiĂ©s par de nombreux scientifiques Ă  travers le monde. Leur maladie a mĂȘme un nom : le « Covid long ».

On estime qu’environ 10% des personnes contaminĂ©es vont dĂ©velopper des symptĂŽmes au long cours : gĂȘne respiratoire, fatigue chronique, problĂšmes neurologiques, tachycardie...Les professionels de la santĂ© se mobilisent pour ces patients lĂ . L’hĂŽpital Foch, par exemple, a mis en place le programme RĂ©hab-Covid, qui prend en charge certains patients atteints de Covid long. Votre mĂ©decin peut vous adresser Ă  ce centre si vous remplissez des critĂšres dĂ©finis.

VoilĂ  qui change notre vision du Covid-19 : il existe une catĂ©gorie intermĂ©diaire entre les cas graves qui finissent Ă  l’hĂŽpital - trĂšs majoritairement des personnes ĂągĂ©es et/ou avec comorbiditĂ©s - et les cas bĂ©nins qui guĂ©rissent naturellement en une ou deux semaines.

Alan a interrogĂ© deux patientes dont les symptĂŽmes perdurent depuis plusieurs mois. Elles ressentent, toutes deux, ce besoin impĂ©rieux de parler de cette maladie, de dire que non, le Covid-19 n’est pas qu’une "simple grippette" pour les personnes jeunes et en bonne santĂ©.

Elisa, 24 ans, Mulhouse, 6 mois de « Covid long »

Des séquelles physiques

« J’ai Ă©tĂ© contaminĂ©e le 20 mars. Six mois plus tard, cette maladie me hante toujours. J’ai encore de consĂ©quentes sĂ©quelles physiques, avec des symptĂŽmes qui reviennent par vague : essoufflements au repos et Ă  l’effort, douleurs et brĂ»lures dans la gorge et le sternum, odorat et goĂ»t qui s'altĂšrent encore rĂ©guliĂšrement, fatigue chronique, courbatures. Mes capacitĂ©s physiques sont rĂ©ellement atteintes alors que je n’avais aucun problĂšme de santĂ© et que j'ai un mode de vie sain. Il y a des jours oĂč le simple fait d’ouvrir un volet est une vĂ©ritable Ă©preuve. Il me faut un quart d'heure pour m’en remettre."

Des séquelles psychologiques

"Psychologiquement, c’est aussi trĂšs dur. Je suis tatoueuse mais je ne peux plus retourner au travail. La vie extĂ©rieure est trop traumatisante. J'ose Ă  peine sortir de chez moi, de peur d’ĂȘtre recontaminĂ©e, de recroiser ce virus. J'ai dĂ©veloppĂ© une phobie du contact avec les autres, j’ai sans cesse peur que les autres ne soient pas aussi prĂ©cautionneux que moi. Je ne peux plus regarder les infos Ă  la tĂ©lĂ© sur le Covid. Ça m'agace trop de voir les gens prendre cette maladie Ă  la lĂ©gĂšre, en laissant entendre que les jeunes ne risquent rien."

La période de maladie

"Ma maladie s’est dĂ©roulĂ©e en trois phases : deux mois d’enfer pendant le confinement, deux mois de rĂ©pit et une rechute dĂ©sespĂ©rante depuis juillet. J’ai Ă©tĂ© trĂšs malade pendant tout le confinement. Bien sĂ»r, je n’étais pas dans un lit d’hĂŽpital comme certains de nos proches mais j’en ai rĂ©ellement bavĂ© pendant deux mois avec notamment des fortes douleurs thoraciques et des brĂ»lures frĂ©quentes depuis la gorge jusqu’au sternum. J’ai dĂ» appeler le Samu 3 fois pendant le confinement. On m’a Ă  chaque fois rĂ©pondu "nous sommes dĂ©solĂ©s, nous ne pouvons rien faire pour vous, rappelez-nous quand vous ne pouvez plus respirer". C'Ă©tait extrĂȘmement traumatisant comme pĂ©riode, j’avais trĂšs peur, je me levais tous les matins en croisant les doigts pour que ça disparaisse enfin. Je pensais ĂȘtre guĂ©rie en mai et juin. Et puis tout est reparti. Quand vais-je enfin voir le bout du tunnel ? »

Martine, 50 ans, Grenoble, 7 mois de « Covid long »

« Je suis tombĂ©e malade trĂšs tĂŽt, dĂ©but fĂ©vrier, alors que personne n’imaginait que le virus Ă©tait dĂ©jĂ  sur le territoire français. Au dĂ©part, c’était une grippe super bizarre, j’étais totalement chaos, je toussais beaucoup et j’avais des difficultĂ©s Ă  respirer. C’est passĂ© au bout d’une dizaine de jours et j’ai repris petit Ă  petit une vie normale.

Entre patients du « Covid long », on appelle ça la « lune de miel » avec le virus. Ce moment oĂč tu penses que tout est fini, oĂč tu retournes dehors. Mais en fait non. Un soir, mi-mars, j'ai senti une rechute. Mon cƓur s’est mis Ă  cogner dans ma poitrine d’une maniĂšre jamais Ă©prouvĂ©e. Je me sentais tellement mal que j’étais au bord d’appeler le 15. Et puis je me suis allongĂ©e et ma frĂ©quence cardiaque a diminuĂ©. J’ai aussi recommencĂ© Ă  avoir des difficultĂ©s passagĂšres Ă  respirer. Quelques semaines plus tard, je suis tombĂ© sur Twitter sur le hashtag #AprĂšsJ20 lancĂ©e par une internaute. On a commencĂ© Ă  Ă©changer entre nous avec un petit cercle de "twittos". Le cercle a grandi considĂ©rablement pendant le confinement. C'Ă©tait tous des gens comme moi, des gens qui se savaient atteints du Covid mais n’avaient pas pu faire de PCR pour le confirmer. Ils avaient tous plus ou moins les mĂȘmes symptĂŽmes revenant par vagues. Les anglais appellent ça des "roller coasters". Tu crois que tu vas mieux et bam, tu rechutes.

Ce qui est terrible avec cette maladie c'est que personne ne te croit. Ma mĂ©decin, que je connais depuis longtemps, m’assurait au dĂ©part que ce n’était pas le Covid. Ce n’est qu’au 3e rendez-vous qu’elle a fini par penser que j’avais bien Ă©tĂ© infectĂ©e par le virus. Elle m’a envoyĂ©e faire une sĂ©rologie fin mai. RĂ©sultat : nĂ©gatif
 J'ai pleurĂ© quand j'ai reçu le rĂ©sultat. Je suis persuadĂ©e d’avoir eu le Covid mais rien ne le prouve officiellement. Il y aura toujours un doute dans les yeux de mes interlocuteurs. Un biologiste m’a expliquĂ© que j’avais fait la sĂ©rologie trop tard, les anticorps ont eu le temps de disparaĂźtre depuis mon infection en fĂ©vrier.

Dans notre groupe de patients « Covid long » sur Twitter, comme sur les groupes Facebook dĂ©diĂ©s, ils sont trĂšs nombreux dans ma situation, dĂ©sespĂ©rĂ©s de ne pas avoir de sĂ©rologie positive. Beaucoup ressentent un vrai sentiment d’injustice. Nous sommes en train de monter une association des patients du « Covid Long ». Nous demandons une reconnaissance officielle, la possibilitĂ© d’avoir un arrĂȘt de travail longue durĂ©e et davantage de recherche autour de la maladie. J’ai parfois l’impression qu’on refuse de nous prendre en considĂ©ration car nous sommes les poils Ă  gratter de la stratĂ©gie de l’immunitĂ© collective. Notre existence rappelle que la Covid, ce n'est pas ce que vous croyez. Ce ne sont pas "juste" des morts et des gens en rĂ©a. Il y a aussi Ă©normĂ©ment de gens qu’on ne voit pas et qui traĂźnent des symptĂŽmes au long cours. »

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Publié le 14/10/2020

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