Le rire peut-il être un véritable outil thérapeutique ? C'est la question qu'explorent Jamel Debbouze et le Dr. Christophe Panichelli dans ce nouvel épisode de Healthier Humanity. Ensemble, ils nous dévoilent comment l'humour, utilisé avec justesse, peut devenir un puissant levier de transformation personnelle et sociale.
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Jamel Debbouze, à travers son expérience au Jamel Comedy Club, nous montre comment l'improvisation théâtrale peut littéralement transformer des vies. "Évidemment que le rire doit être beaucoup plus présent dans nos sociétés. Il doit être nourri. Il doit être mis en valeur," affirme-t-il, partageant des histoires touchantes d'individus qui ont surmonté leur timidité et leurs peurs grâce à la scène.
De son côté, le Dr. Panichelli apporte un éclairage clinique crucial : "L'humour, c'est un outil. Et un outil, on peut l'utiliser d'une façon positive ou d'une façon négative." À travers son expérience de psychiatre, il démontre comment l'humour peut aider les patients à voir leurs difficultés sous un nouvel angle et à progresser dans leur thérapie.
Dans cette conversation riche en enseignements, nos deux experts partagent :
Cette discussion démontre que le rire n'est pas qu'un simple divertissement - c'est un outil puissant de développement personnel et de bien-être mental. Que vous soyez professionnel de santé, en quête de développement personnel, ou simplement curieux, cet épisode vous donnera les clés pour comprendre et utiliser le pouvoir thérapeutique du rire.
Jean-Charles : Bonjour et bienvenue dans le podcast Healthier Humanity, un podcast où moi, Jean-Charles Samuelian, votre hôte, cofondateur d’ALAN, j'interview des experts de la santé, de la longévité, des sujets connexes à ça. Ça peut être des athlètes de haut niveau, des médecins, des philosophes, des humoristes, et on échange ensemble dans un voyage pour apprendre sur nous-mêmes comment on peut vivre mieux, plus longtemps, chaque jour. C'est la promesse d'Healthier Humanity. Bienvenue dans cet épisode. Aujourd'hui, j'ai le plaisir d'accueillir... Deux invités pour un épisode autour du rire, de l'humour et de leurs effets sur la santé. C'est deux personnes qui font le même métier mais d'une manière un petit peu différente et on va découvrir pourquoi. D'abord, j'ai l'honneur d'accueillir Jamel Debbouze, qu'on ne présente plus, qui a fait du rire non seulement un art mais aussi une science parce qu'il partage, il a fait grandir beaucoup d'humoristes autour de lui en leur expliquant comment faire et qui a dit lui-même que le rire était un magnifique médicament pour aborder n'importe quelle situation. Pour l'accompagner, le docteur Christophe Panichelli, psychiatre et psychothérapeute spécialisé dans l'étude et l'application de l'humour en psychothérapie. Il est l'auteur d'un livre, La thérapie par le rire, et de nombreux articles scientifiques qui sont publiés. Merci à tous les deux d'être avec nous aujourd'hui.
Dr. Panichelli : Avec plaisir. Jamel Debbouze : Merci de nous inviter.
Dr. Panichelli : C'est le seul livre de psychologie qui contient comme mot-clé le mot hémorroïde dans son index. Pour des raisons scientifiques. Alors attention, ce n'est pas le contraire. Ce n'est pas l'index dans l’...
Jean-Charles : Je ne savais pas qu'on allait commencer directement par les blagues de cul, mais...
Dr. Panichelli : Faut commencer ça après,
Jamel Debbouze : mais ça me va très bien. Ok.
Jean-Charles : Mais d'abord, peut-être, racontez-moi pourquoi vous avez tous les deux décidé de placer le rire et l'humour au centre de votre vie.
Dr. Panichelli : À toi, Jamel. Ben moi si je dois commencer, tout simplement comme je raconte toujours, je suis né dans une famille où tout le monde faisait de l'humour à des degrés divers, mes parents, mes grands-parents, mes cousins. Et donc ça me paraissait tellement naturel d'utiliser l'humour aussi avec mes patients. Et puis quand je suis devenu psychiatre, ça me paraissait naturel mais je me suis posé la question de bon, est-ce que c'est bien sérieux et surtout est-ce que c'est utile pour le patient, pour le faire avancer, pour lui faire du bien ? Et donc c'est comme ça que je me suis intéressé au sujet, j'ai commencé à lire. Tout ce qui était sorti là-dessus, j'ai découvert qu'il y avait différentes thérapies, notamment créées par Albert Ellis ou Franck Farelli, qui utilisent l'humour comme ingrédient central pour aider le patient. Et voilà comment je suis arrivé sur ce sujet-là.
Jamel Debbouze : J'ai envie de dire la même chose. Ça vient souvent de l'enfance. Moi, j'ai des grands-parents qui étaient très, très drôles. Ma mère est très marrante. C'était une manière de dédramatiser le contexte dans lequel on vivait, qui n'était pas dramatique pour autant, en tout cas, nous, on ne le vivait pas comme un drame. Probablement au plus, mais c'était une forme d'expression naturelle que j'ai reproduite. J'étais même surpris d'être payé pour ça, pour tout dire.
Dr. Panichelli : Moi aussi, au fait.
Jean-Charles : Je suis le seul pas payé pour ça.
Dr. Panichelli : Aujourd'hui, oui.
Jean-Charles : Certaines études, et on va rentrer à la fois sur le sujet avec des angles différents, montrent que le rire... et le sens de l'humour peuvent allonger l'espérance de vie. Docteur Panichelli, d'un point de vue physiologique, quels sont les effets du rire sur le corps humain ?
Dr. Panichelli : Alors j'ai envie de répondre à cette question-là en vous racontant tout de suite une petite blague. C'est l'histoire d'un type qui va chez son médecin traitant et qui lui dit « Docteur, et si j'arrête de boire, de fumer et de faire l'amour ? Est-ce que je vais vivre plus longtemps au moins ? » Et son médecin lui répond « Non, vous n'allez pas vivre plus longtemps, mais par contre, ça va vous sembler beaucoup plus long.» Elle est bonne. Mais maintenant, si je vous dis que cette blague-là, c'est un patient gravement alcoolique qui me l'a raconté, tout de suite, on sent qu'on a moins envie de rire et de trouver ça très drôle. Et donc, ça montre bien que... Parce qu'on sent que ce patient-là, sans doute, utilise l'humour pour minimiser les risques qu'il prend avec sa santé.
Et donc, ce que je dis toujours, c'est que l'humour, c'est un outil. Et un outil, on peut l'utiliser d'une façon positive ou d'une façon négative, comme n'importe quel outil. Si je prends la guitare qui est là, par exemple, eh bien une guitare c'est un outil génial pour faire de la musique, pour chanter des chansons, etc., pour détendre l'atmosphère, pour passer une bonne soirée avec des amis. Par contre, si on l'écrase sur la tête de quelqu'un, eh bien on voit tout de suite que ça ne va pas être très bon pour sa santé. Eh bien l'humour c'est la même chose, on peut l'utiliser aussi pour agresser les gens, pour harceler les gens, il y a des jeunes qui se suicident à cause du harcèlement sur les réseaux sociaux. Et donc l'humour c'est un truc génial et magnifique, mais on peut aussi l'utiliser de façon négative.
Et donc, il y a des scientifiques qui se sont intéressés à ça aussi, notamment dans une étude américaine qui s'appelle l'étude de Terman, je rentre tout de suite dans les détails techniques, qui a suivi plus de 1000 personnes américaines sur à peu près 100 ans. Ça a commencé en 1922, et on a demandé à un parent et un prof de ces petits jeunes-là, qui avaient 12 ans à l'époque, est-ce que ce sont des petits rigolos, est-ce qu'ils ont de l'humour ou pas ? Et après on a regardé s'ils mouraient plus vite, et ceux de qui on disait qu'ils avaient un sens de l'humour plus prononcé, ils mouraient plus vite que les autres. C'était un facteur de risque de mortalité aussi grave que l'hypertension ou le cholestérol et des choses comme ça. Probablement à cause de ce côté où les gens qui ont plus d'humour souvent, surtout ceux qui ont l'humour social, qui sont des pires rigolos et qui aiment bien faire la fête, etc., ils ont probablement plus tendance à ne pas tenir compte des avis pour leur santé et à prendre plus de risques avec leur santé.
Alors, il y a d'autres études après qui ont précisé ça, et qui se sont dit, oui, mais attention, parce que c'est vrai quand même qu'on sent que l'humour peut être bon, et c'est une croyance très répandue dans la population. Et donc, il y a une autre étude qui a été faite en Norvège, sur 50 000 personnes là-bas, qui a duré 15 ans, et là, ils ont séparé, ils ont posé deux questions, ils ont séparé l'humour social, des gens qui aiment bien faire la fête, et l'humour cognitif des gens qui savent reconnaître les petits côtés comiques des situations pour mieux la gérer après. Ils ont vu que ce sens de l'humour social, en effet, ça confirmait que ça augmentait la mortalité, mais que par contre, le sens d'humour cognitif, en effet, avait un effet positif sur la santé et sur la diminution de la mortalité.
Jean-Charles : Jamel, tu nous racontais tout à l'heure une anecdote sur avoir vu l'effet du rire sur quelqu'un et de l'humour. Est-ce que tu peux nous raconter, toi, de manière très réelle, des histoires où l'humour a eu un impact sur la santé des gens ?
Jamel Debbouze : Oui, sur la santé, oui, par extension, et sur le psyché, c'est certain, tout de suite. J'ai pris des cours d'improvisation théâtrale. C'est un outil extraordinaire parce qu'il n'y a pas l'aspect pompeux du théâtre avec ce texte qu'on doit prendre par cœur, rentrer dans des personnages. Là, vraiment, on fait appel à l'imaginaire et à notre propre identité.
Je me souviens d'un cours d'improvisation théâtrale à Bordeaux. Une fillette, je ne sais pas, elle devait avoir 15-16 ans. Elle n'était pas bonne à l'école, ça ne se passait pas bien dans sa famille apparemment. Et elle se laissait complètement aller. Elle avait les cheveux comme ça, je sentais qu'elle se négligeait vraiment. Et on lui a demandé de rentrer dans le cercle. Elle est rentrée dans le cercle en mettant ses cheveux sur son visage. Elle parlait à peine, elle était comme ça, elle faisait pas trop... On comprenait rien à ce qu'elle disait.
Le prof lui a demandé juste de dégager son visage et de lever la tête pour regarder les gens. Elle a eu beaucoup de mal à faire ce geste. C'est là que je me suis rendu compte que quand même... C'est ce qui peut paraître complètement anodin pour certains, ce sont une montagne pour d'autres. Donc elle a mis, je ne sais pas, 10 minutes à relever ses cheveux, à relever la tête, et là ils l'ont applaudie et elle est sortie, elle n'a rien dit. Elle n'a même pas fait l'exercice. Et il a filmé, il a filmé sa progression, la progression de ce groupe, dont cette fille.
Et la semaine d'après, elle est revenue, elle s'était attachée les cheveux, déjà. Elle est rentrée dans le cercle, et là... Elle a commencé à parler. Alors, ce n'était pas tout à fait audible encore, mais elle avait vraiment fait un progrès significatif. Elle se négligeait toujours. La troisième semaine, la deuxième fois où elle arrivait, elle a fait un petit effet. Ça a fait un peu rire. Elle est repartie. La troisième semaine, elle s'était apprêtée pour le cours. Ses cheveux étaient super bien tenus. Elle est rentrée et c'était complètement audible. Elle a su mais enfin... Elle regardait les gens dans les yeux.
À la fin du cycle, c'était l'une des meilleures. Elle s'était complètement ouverte, elle était complètement épanouie. Les rires qu'elle provoquait la nourrissaient, la galvanisaient, les applaudissements pareils. Et elle a fini par être une bonne élève. Et ça, c'était physique. J'ai vu cette enfance s'ouvrir comme une fleur s'ouvrir, avec le rapport au soleil. C'est cette considération que te donne le public, le regard des autres. Et quand le véhicule, c'est le rire, j'ai le sentiment que ça nous libère quelque part, ça nous donne confiance en nous et c'est une manière très forte et très rapide de sociabiliser.
Ça a le même effet qu'un... qu'un ballon de foot. Vous arrivez dans n'importe quel pays au monde, vous posez un ballon, vous le faites rouler, il y aura quelqu'un pour vous le rendre. Ça a cette force. Et pareil, si l'une des personnes les plus connues au monde, c'est Charlie Chaplin, c'est pas pour rien. Il avait le corps, évidemment, mais il avait cette faculté de nous faire rire avec des drames absolus. Je pense, oui, vraiment que le rire, ça a un impact direct sur le mental. Et le mental a un impact direct sur la santé. Tout ça est lié.
Jean-Charles : Et en parlant de ça, est-ce que vous pouvez nous parler, docteur, de la théorie du relâchement, qui suggère que le rire permet de libérer l'attention physique et psychique ?
Dr. Panichelli : Oui, tout à fait. Donc, il y a plusieurs théories de l'humour, et la théorie du relâchement, c'est une de ces trois théories principales, on peut dire. C'est celle qui explique que quand on fait attention à quelque chose, ou si on est stressé par quelque chose, il y a comme... une accumulation de tensions et d'énergie psychique et parfois l'humour ça permet de relâcher d'un seul coup toute cette énergie psychique.
C'est une théorie qui a été vulgarisée ou rendue connue par Freud et Emmanuel Kant avant lui et surtout qui a après permis de conceptualiser les différentes manières de gérer la souffrance qu'a l'individu humain par la psychologie. C'est ce qu'on appelle les mécanismes de défense contre l'anxiété. Depuis Freud, ils ont fait la liste de tout ça, il y en a à peu près une trentaine. Et l'humour fait partie des huit meilleurs, c'est-à-dire que c'est un mécanisme qui permet de regarder la réalité en face, de ne pas la nier, et après d'abaisser l'anxiété qui va avec, si elle est terrifiante par exemple, et puis de mieux la gérer. Donc ça c'est ce qu'on appelle en anglais les mécanismes de coping.
Jean-Charles : Jamel, est-ce que toi tu te perds ce... Personnellement, tu as ressenti que l'humour t'aidait à libérer ta tension, ton stress et ton anxiété ? Tu l'as ressenti ? Comment tu le vois avec ton public ?
Jamel Debbouze : Je l'ai ressenti, mais c'est un outil. C'est un outil dans ma vie. Je me sers de ça régulièrement. Encore faut-il s'en rappeler. Toutes ces situations ne sont pas faciles à gérer, mais la plupart du temps, dédramatiser, désamorcer, ça permet de prendre de la distance. réagir à chaud, réagir instinctivement, spontanément, c'est pas forcément, ça dépend des situations, mais c'est pas forcément la meilleure façon de faire.
Alors qu'effectivement, à chaque fois qu'il y avait une tension au sein du Comédie Club, là récemment, entre deux comiques, c'est une val qui a permis de détendre l'atmosphère. Tout le monde a ri en même temps, et on a pris tous ensemble la mesure du grotesque de la situation, tu vois, on est passé à autre chose. Et c'est vrai que ça permet vraiment de désamorcer pas mal de choses. C'est un outil extraordinaire à plein d'égards, le rire.
Dr. Panichelli : Ça rétablit une connexion entre les gens aussi, qui parfois étaient dans une tension ou dans un conflit, et tout d'un coup, on peut se sentir de nouveau frère, quoi, sur le même pied d'égalité. Au moment que c'est pas moqueur et que ça rabaisse pas la personne, ça rétablit la relation comme ça, de façon très sûre.
Jamel Debbouze : Bien sûr.
Jean-Charles : Et du coup, on en parlait, quels sont les différents types d'humour et de rire ? Et toi, quelle est ta panoplie, par exemple, d'humour ? Est-ce que tu as codifié un peu ça, les différentes cordes et les différentes stratégies ? Et comment ça se traduit après d'un point de vue clinique ? Je serais intéressé d'avoir les deux.
Jamel Debbouze : Non, je n'ai pas codifié. Je n'ai rien de hiérarchiser. En tout cas, il y a différents supports. Tu vois, la scène, ça n'a strictement rien à voir avec faire une comédie au cinéma. Le rire ne parvient pas de la même manière, le temps n'est pas du tout le même. Il y a une spontanéité, une urgence, une dangerosité même sur scène. Tu vois, si t'es pas drôle, t'es mort. C'est tout. Si t'as pas de rire, t'as pas d'oxygène. Alors que dans une comédie, le rire tu le consommes quasiment deux ans après avoir joué la situation. Dans une salle, à travers un écran, c'est vraiment complètement différent. Tu ne prends pas le même plaisir. Il y a quelque chose d'organique et de beaucoup plus fort sur une scène, c'est évident. La vibration même que te provoquent les rires, ceux qui te parviennent. Il y a une espèce d'onde positive à chaque fois. C'est pour ça que tu vas faire rire une fois sur scène dans ta vie, tu y retournes comme une espèce de drogue parce que ça fait du bien à ton âme. Tu vois, vraiment, ça nourrit à plein d'endroits.
On a l'impression d'exister. On a l'impression d'avoir... On a pris beaucoup de plaisir, mais on a l'impression aussi d'avoir été utile. Maintenant... Toutes les formes d'humour possibles et imaginables ont à peu près le même effet chez le récepteur. Sauf sur scène où l'émetteur prend énormément de plaisir en même temps que le récepteur. Si ce n'est plus. Tu vois, la scène, j'ai le sentiment à chaque fois que je monte sur scène et que le spectacle se passe bien, qu'il y a une ambiance, qu'il y a quelque chose de rassurant de... je sais pas... Il y a quelque chose de galvanisant évidemment, mais qui fait du bien, qui fait du bien à tous. Pendant deux heures, c'est ce que nous fait aussi le cinéma. Tu vois, quand on réussit à sortir de ses problèmes pendant deux heures, c'est extraordinaire, il n'y a que le spectacle qui donne ça comme sentiment.
Jean-Charles : Et docteur, vous voyez différentes typologies de rires, et est-ce que vous avez étudié ces... Vous avez parlé tout à l'heure des deux rires... de cette étude norvégienne ? Est-ce qu'il y a d'autres catégorisations et d'autres réflexions là-dessus ?
Dr. Panichelli : J'ai envie de réagir à ce que dit Jamel aussi, parce que ça me fait penser que moi, mes spectateurs, c'est les patients, et en fait, ce ne sont pas des spectateurs, c'est plus moi, en premier lieu, qui suis spectateur de leur vie et de tout ce qu'ils me racontent, et surtout de la souffrance qu'ils viennent m'apporter. Donc il y a quelque chose de très différent, dans le sens où moi, je suis d'abord devant quelqu'un qui souffre, quoi, et qui vient me raconter son histoire, et qui vient m'essayer de s'en sortir mieux avec son histoire.
Et alors moi quand j'utilise l'humour là-dedans, quelque part c'est peut-être un peu aussi pour survivre par rapport à toute cette souffrance qu'on me bombarde dans la figure toute la journée. Et comme j'avais ça un peu dans ma famille dès le départ, je me suis mis à utiliser ça aussi dans cette constance-là.
Jamel Debbouze : C'est sûr, c’est un bouclier à tout.
Dr. Panichelli : Voilà, pour survivre moi et puis pour essayer de tirer le patient dans le bon sens, pour dire allez viens par là, ça va être plus marrant si on va par là ensemble, plutôt que de rester à se morfondre.
Jamel Debbouze : Mais si je peux me permettre pour rebondir sur ce que vous dites tous les deux il y a il y a un élément en tout cas qui m'a vraiment beaucoup aidé c'est le corps en plus de l'esprit c'est d'engager mon corps. Je vois l'improvisation théâtrale ça devrait être un outil, ça devrait être un outil…
Dr. Panichelli : De thérapie.
Jamel Debbouze : Ouais, ouais. Parce que, parce que ça fait l'appel à soi et on te demande, on te demande un effort déjà tu vois. Tu n'es pas juste là à te plaindre. C'est important, c'est aussi être actif qui compte. C'est l'aspect organique moi qui m'a le plus galvanisé, qui m'a le plus fait kiffer, et puis évidemment quand tu sais jouer avec ton corps tu peux t'en servir pour faire rêver les gens en dansant ou pour les faire rire. Chaplin tu vois, de Funès, j'en passe et des meilleurs...
Moi, j'avais besoin de mon corps, de l'engager dans tous les sens, pour plein de raisons. Et je trouvais que l'improvisation théâtrale, ça nous obligeait à nous auto-analyser d'une certaine manière et à nous pousser hors de notre zone de confort. Parce qu'il y a la plainte, le constat que je ne suis pas bien, que je suis ci, que je suis ça, mais tu ne peux pas t'en sortir si tu ne fais que parler. J'ai le sentiment. Il faut aussi engager le corps.
Regarde, moi, ma mère, elle est très très drôle. Elle ne parle pas très bien français. Elle parle très bien arabe, mais elle a une langue bien à elle. Plus son corps, parce qu'elle n'est pas très grande, elle est de ma taille, plus son corps, elle réussissait à dédramatiser des situations follement tendues. Parce qu'elle avait conscience qu'il fallait qu'elle détourne l'attention, d'une certaine manière. Elle s'est trouvée comme outil le rire. Elle se servait de sa voix, de son accent, de sa verbe, mais surtout de son corps.
J'ai vraiment le sentiment que quand nous, on fait rire, on a à notre disposition des outils, mais... il est impensable de faire appel qu'à des trucs purement techniques. C'est forcément l'addition de plein de choses qui vous réveille. C'est pas simplement que de rire, c'est aussi le provoquer, je sais pas si je suis clair, et on le provoque physiquement j'ai l'impression.
Thérapie par l'improvisation [19:48 - 22:09]
Dr. Panichelli : Je trouve ça très intéressant ce que tu dis, parce qu'en psychothérapie et en psychiatrie, peut-être en médecine toujours, l'idée c'est qu'après on va renvoyer les gens dans la vraie vie, comme si on les lançait dans l'arène, et dans l'arène c'est pas toujours sympa, les gens autour d'eux sont parfois cruels, etc. Donc le but c'est de pouvoir réagir à tout ça de façon la plus adaptée possible, et si on a fait de l'impro, peut-être bien que ça peut aider, moi j'ai déjà envoyé des patients s'inscrire à des clubs d'impro, parce que... Ils avaient une phobie sociale, comme on dit, tellement peur de regarder les gens dans les yeux ou de parler à la caissière, etc. Que je me dis, mais il faut qu'ils pratiquent quelque chose. Et donc, je trouvais que c'était un outil très intéressant pour les lancer dans l'arène.
Jamel Debbouze : Et même pour régler des conflits. Je me souviens, moi, je donnais des cours d'impro à Trappes et c'était chaud quand même. On était en ZEP, je vois, et moi, j'étais très jeune. J'avais dans ma classe Issa Doumbia, j'avais des gamins. Et il y a eu une bagarre. Une bagarre, pour un prétexte ridicule, une bagarre que j'ai séparée. J'ai assis les deux protagonistes et tous les autres se sont assis. J'ai pris deux gamins que j'ai briefés et je leur ai demandé de rejouer le conflit, leur conflit, en les imitant. Ils sont foutus de leur gueule. Mais tout le monde était mort de rire en même temps. On est passé à l'exercice suivant derrière sans problème.
Dr. Panichelli : Mais eux aussi, peut-être,
Jamel Debbouze : Mais oui, mais c'est surtout eux. Je les ai mis, je te dis, spectateurs de leur propre connerie. Mais oui. Ils se sont vus faire n'importe quoi. Et c'était irrésistible, tu vois. Ça a fait rigoler tout le monde. Allez, stop. On est passé à autre chose.
Jamel Debbouze : tout à fait. Oui. Et là, encore une fois, le corps. On va chercher le rire. On est dans la parodie. On se fout de la gueule de la personne qui s'est mal comportée. Donc, on a de la distance. Et puis on engage tout le monde. Il n'y a pas de jugement. C'est surtout ça le plus important, pour rire tranquillement. On n'est pas dans la moquerie. On n'est pas dans un jugement de valeur. On rit d'une situation, d'un comportement.
Dr. Panichelli : Parce que l'ambiance aussi, dans le club d'impros, est bienveillante globalement.
Jamel Debbouze : Bien sûr, ça le permettait.
Dr. Panichelli : Donc si tout le monde rit, on sait qu'il y a de l'amitié.
Jamel Debbouze : Bien sûr. Jamel Debbouze : c'est ça. Bien sûr.
Dr. Panichelli : Et le moment qu'il y a ça, on peut tout faire, en fait.
Jamel Debbouze : Oui.
Dr. Panichelli : Exactement.
Jamel Debbouze : Oui, oui.
Jean-Charles : Du coup, ça me pose plein de questions. La première, c'est qu'on parlait de cette relation du corps, mais qu'est-ce qui se passe dans notre cerveau et dans notre corps en tant qu'être humain quand on rigole ? Est-ce qu'il y a des hormones spécifiques qui se sont relâchées ? Qu'est-ce qui se passe physiologiquement ?
Dr. Panichelli : Alors ça, c'est une question un peu piège, peut-être parce qu'il y a plein d'études qui ont été faites, mais il n'y a pas grand-chose qui en est ressorti, en fait. C'est-à-dire qu'ils ont trouvé plein de trucs. Par exemple, ils ont trouvé que quand les gens regardent des comédies et rient, alors il y a plus d'immunoglobine, d'immunoglobuline A dans la salive. Ouais mais bon alors après ils ont oublié de vérifier si c'était le matin ou le midi qu'on a fait l'expérience parce que l'immunoglobuline A dans la salive, ça varie en fonction de la journée. Donc après finalement c'est pas du tout ce que ça veut dire ce qu'on a trouvé comme données scientifiques.
Donc il y a plein d'expériences qui ont été faites pour mesurer différentes choses sur les hormones. Par exemple ils n'ont pas trouvé grand chose, on dit toujours que ça augmente les endorphines mais ils n'ont pas trouvé grand chose manifestement. Donc c'est la croyance comme quoi l'humour est bon pour la santé, elle est très très forte, mais elle n'est pas vraiment étayée par des données scientifiques, sauf de ce que je disais tout à l'heure, de cette étude-là en Norvège notamment, qui a montré que quand on a un regard rigolo, un regard capable d'aller chercher les côtés comiques des situations, ça, ça peut aider à être plus longtemps en vie après. Mais au niveau vraiment physiologique, ils n'ont pas trouvé beaucoup de données très intéressantes.
Jamel Debbouze : Mais pour autant, sur le corps, ça provoque vraiment quelque chose de physique. Il m'arrive de faire la gueule, comme tout le monde.
Dr. Panichelli : Même toi ?
Jamel Debbouze : Ouais, vraiment. Je me réveille, je suis de travers. Je croise des gens qui veulent faire des selfies. Je vais chercher une énergie considérable pour selfieser, parce qu'ils n'ont rien demandé, c'est la première fois qu'ils me croisent. Même à la 120ème personne, je vais chercher une énergie de fou alors que j'ai passé une mauvaise nuit.
Et à contrario, quand ça m'est arrivé souvent, je sais que je vais jouer ce soir, je suis heureux, je me réveille en étant heureux, je garde cette banane et elle me transporte jusqu'au soir. Le soir, je ne me pose pas question, je suis heureux, je joue, ça se passe super bien et je me couche heureux. Tu vois, il m'est arrivé, alors là, c'est parce que j'avais un objectif cool, mais peu importe, j'imagine que si... Et il m'est arrivé aussi de me réveiller heureux, content, sans aucune raison valable et de le tenir toute la journée. Je ne passe pas la même journée avec la banane, avec cette espèce de détente. Et même parfois, je la provoque. Il m'arrive de me dire, j'ai aucune raison de ne pas sourire là. Tu vois, ou de ne pas être content. Je m'en rappelle. Et ça me repimpe un peu.
Jean-Charles : Il y a des gens qui t'énergisent. Moi, je trouve qu'avec quelqu'un qui te fait rire, tu sors énergisé. Tu as passé plus de temps, au sort de cette discussion, une meilleure personne que ce que tu es rentré.
Jamel Debbouze : En tout cas.
Jean-Charles : Alors qu'il y a des gens, tu ressors, tu n'as pas envie de mourir.
Jamel Debbouze : Oui, c'est vrai. C'est super important d'être avec des gens quand même qui t'envoient de la positivité, de la bonne vibe. C'est sûr.
Dr. Panichelli : Et en effet, il y a moyen de se reconnecter soi-même activement. Il y a des psychologues américains et hollandais qui appellent ça le « loving state ». C'est repenser à quelque chose de chouette qui nous fait vraiment plaisir. Par exemple, repenser à le truc qui nous a fait le plus rire dans notre vie. Ce souvenir-là, c'est reconnecter, ça met de bonne humeur. C'est vraiment accueillir les gens autrement. Par exemple, quand on accueille les patients en thérapie qui sont souvent...
Jamel Debbouze : Aucune idée, je ne peux pas vous... Moi, je serais capable de vous dire si c'est bon pour la santé le rire. Mais il est évident que c'est plus facile de vivre avec. Ça facilite beaucoup de choses.
Dr. Panichelli : La vie est meilleure.
Jamel Debbouze : Ton état intérieur déjà, tu vois. Ton mindset, ça se dit mindset ? Mindset. Je suis bien,
Dr. Panichelli : mais moi ça reste ce bruit.
Jamel Debbouze : Non, c'est vrai.
Les différents styles d'humour [26:07 - 27:49]
Dr. Panichelli : Peut-être on peut enchaîner sur les différences styles d'humour qui ont été étudiés dans différentes études. Donc, comme vous disiez, il y a plein d'études qui ont été faites sur les gens qui ont le sens de l'humour, est-ce qu'ils sont en meilleure santé, est-ce qu'ils ont une plus grande tension artérielle, non, etc. Ils n'ont pas une plus basse tension artérielle, enfin bref. Et alors, il y a des psychologues qui se sont dit, mais au fait, le sens de l'humour, c'est un truc très complexe. On dit ça en quelques mots, mais c'est pas que une manière de faire de l'humour. Et donc, par exemple, il y a l'équipe de Martin qui a séparé l'humour en quatre manières différentes de faire de l'humour.
Il y a faire de l'humour pour se mettre en valeur soi-même, par exemple, quand on raconte une blague et alors on montre que soi-même on connaît la fin de la blague. C'est déjà très différent que faire de l'humour dans un groupe pour mettre tout le monde à l'aise. Ça c'est Mandela qui est coincé dans un ascenseur et qui fait plein de petites blagues comme ça pour faire rire tout le monde et plus personne ne stresse dans l'ascenseur coincé. Ça c'est l'humour d'affiliation. Et puis il y a des gens qui font de l'humour pour agresser les autres et pour les rabaisser, pour se valoriser eux-mêmes peut-être.
Jamel Debbouze : Et puis il y a l'humour sarkozien,
Dr. Panichelli : par exemple, éventuellement. Et alors il y a l'humour aussi...
Jamel Debbouze : Ça sera coupé au montage ?
Jean-Charles : Rien ne sera coupé. On a commencé par les hémorroïdes, tu sais.
Dr. Panichelli : Oui, ça va être bon. Maintenant, j'ai mis la barre très haut dès le début. Enfin très bas, plutôt.
Et alors la dernière manière, c'est l'humour agressif envers soi-même, l'humour d'autodérision. Et là, il y a par exemple des études qui ont montré que les gens qui font trop d'humour d'autodérision, de façon systématique et exagérée, ils ont plus de dépression, plus d'anxiété, une plus basse estime d'eux-mêmes, etc. Donc c'est vraiment la manière dont on utilise ça. On peut se faire du bien soi-même avec l'humour, mais on peut se faire du mal à soi-même aussi. Et autour de soi aussi, bien sûr.
Jamel Debbouze : Je suis d'accord. C'est vrai, il y a beaucoup de types d'humour. Et puis moi, il y a un humour que je n'appelle pas ça l'humour. C'est un humour qui ne fait rire qu'une catégorie de personnes, ceux qui le font d'ailleurs. C'est génial. C'est la moquerie. La moquerie, le mépris, se foutre de quelqu'un, le rabaisser, avoir l'ascendant social sur lui tout de suite, parce que les gens ont ri de cette blague sur son physique. Sur son identité, c'est oui, je dirais parfois marrant, c'est jamais marrant dès lors qu'il y en a un qui est blessé pour moi.
Et cet humour qu'on trouve très souvent sur les réseaux sociaux, vous en avez parlé, ce truc facile, parce que l'humour vulgaire c'est pas facile, faire de la vulgarité. C'est un art. C'est vrai, être bien vulgaire et puis le faire de... subtil et élégante, il n'y a pas beaucoup qui y arrivent. La vulgarité, on peut faire vulgaire, comme ça on en indique, mais ce n'est pas donné à tout le monde. Alors que la moquerie, c'est donné à tout le monde. C'est là où ce n'est plus l'humour.
Dr. Panichelli : C'est facile. Jamel Debbouze : Oui, c'est très facile. On a ces réflexes un peu bestiaux où on réagit en meute dans ces cas-là, souvent. Je l'ai vu dans des salles de spectacle, et j'ai eu recours à la moquerie. Mais j'ai arrêté quand j'ai vu que ça faisait du mal, et que c'était plus marrant dès lors qu'il y en avait un qui avait mal.
Dr. Panichelli : Et tu en as parlé tout à l'heure, justement, c'est cette nuance entre taquiner amicalement quelqu'un, même si on se fout de sa gueule, mais gentiment, où on sent qu'il y a de la bienveillance et de l'amitié, et rabaisser pour faire du mal.
Jamel Debbouze : Voilà, c'est comme les blagues racistes. Il y a des propres effets.
Dr. Panichelli : ou sexiste,
Jamel Debbouze : bien sûr, homophobe, ou ce que vous voulez, tous les trucs qui finissent par phobe, histe, moi, j'ai aucun problème à rire de ça, à condition que ça soit fait par quelqu'un qui ne le pense absolument pas, et qu'à ce décalage, il y ait ce second degré, c'est ça qui est drôle. Et c'est pas parce qu'il est noir qu'il peut faire des blagues sur les noirs, ou pas parce qu'il est homo qu'il peut faire des blagues sur les homos, moi, j'aime quand il n'y a pas de communauté, quand ... Quand une femme prend la défense d'un homme, quand un homme prend la défense d'un... Tu vois ? Quand on est tous ensemble.
Dr. Panichelli : Oui, quand on est tous des humains. Sur le même pied d'égalité. Oui.
Jean-Charles : Mais du coup, j'ai l'impression qu'un bon outil sur scène, il y a un peu d'autodérision. Et on disait que l'autodérision a des limites aussi. Quel est le bon degré d'autodérision qu'on peut avoir et comment la pratiquer ?
Dr. Panichelli : C'est justement intéressant de poser la question à Jamel, parce que beaucoup d'humoristes seuls en scène font beaucoup d'autodérision. Moi, je dis souvent que c'est une manière géniale pour descendre de la scène, descendre de son piédestal, que moi, je suis tout seul sur la scène, et puis je me mets au même niveau que vous.
En tant que thérapeute, c'est un outil super, parce qu'on est toujours aussi sur la position du péril, parce que c'est le patient qui vient me parler de ses problèmes, et nous, jamais un autre, ou presque. Et donc, on est toujours dans la position de celui qui va expliquer comment il faut faire, parce que l'autre, il sait pas le faire. Et donc faire de l'humour en se manquant un petit peu de soi-même, ça permet de dire, ok, on est dans la même équipe, et on va réfléchir ensemble.
Jamel Debbouze : C'est la meilleure manière d'aborder une conversation.
Dr. Panichelli : Oui.
Jamel Debbouze : Oui, parce que, qu'est-ce qui... Il n'y a pas de règle, mais ce qui fait généralement le plus rire, c'est l'identification. Parce que quand tu as le sentiment qu'il parle de toi, et il peut parler de toi, que s'il se met à ton niveau. Et là, tu es déjà trop grand, effectivement. T'es éclairé, t'es... Et l'autodérision permet vraiment de rentrer tout de suite en connexion. Parce que là, on dit, on est ensemble, on est pareil. Je vais vous raconter ce qui m'est arrivé la veille. Ça vous est certainement déjà arrivé. Et vous n'êtes pas seul. Dr. Panichelli : C'est ça,
Jamel Debbouze : exactement. Et là, il y a une connexion possible. Et de toute façon, c'est ce qu'il y a de plus marrant de se foutre de sa gueule. C'est vrai. Je ne fais que ça, moi, toute ma vie.
Dr. Panichelli : Mais tu vois, ce qui est intéressant, c'est de réaliser que c'est des situations particulières, être sur scène ou bien être thérapeute en face d'un patient. Là, c'est des situations où c'est utile, où on a besoin d'autodérision pour rejoindre l'autre en face de soi. Par contre, si on fait ça toute la journée, tout le temps, moi, j'ai des patients, des fois, ça me rend triste de dire « Mais arrêtez de vous foutre de votre gueule tout le temps, vous êtes en train de vous rabaisser toute la journée. » Ça ne doit pas faire du bien au moral. On sent bien que ça entretient une ambiance comme ça, morose. Oui, mais quand il se met à utiliser l'humour tout le temps comme ça, pour faire peut-être alliance avec la personne en face, qu'elles sont bloquées là-dedans, ça ne leur rend plus service. Ça entretient la dépression ou l'anxiété.
Jamel Debbouze : C'est un artifice de narration, l'autodérision. Évidemment, heureusement. Parce qu'il me concerne, en tout cas. Mais c'est vrai que, de toute façon, c'est une manière vraiment de connecter. C'est indéniable. De toute façon, sinon on est condescendant. Dr. Panichelli : Oui, c'est ça.
Jamel Debbouze : Il n'y a pas d'autre alternative.
Dr. Panichelli : Dans une situation, tu as besoin de ça, sinon tu es condescendant.
Jamel Debbouze : Non, mais condescendant tout de suite, je trouve.
Dr. Panichelli : Tout à fait. Moi, c'est la même chose.
Jamel Debbouze : Oui. Déjà qu'on est sur un piédestal, on vient à votre cabinet. On vient dans nos salles de spectacle. C'est des gens qui se déplacent à nous. Oui, c'est ça. Et déjà, en soi, il y a un rapport hiérarchique qui s'installe, que tu le veuilles ou non. Tout à fait. Il faut casser cette barrière immédiatement. Et ils viennent chercher soit du réconfort, soit de passer un bon moment, soit d'oublier, soit de déconnecter pour reconnecter avec autre chose. Mais ils viennent chercher quelque chose.
Dr. Panichelli : Oui, j'aime bien quand tu dis qu'il faut casser ça immédiatement. Tu sais quand les gens sonnent à ma sonnette, alors je les vois sur le petit écran, ils sont dans le hall d'entrée, alors je dis BONJOUR, ils sont très forts dans le micro, alors ils sont un peu secoués, déjà ça casse quelques grammes, c'est un peu surpris, c'est quoi cette ambiance ici ?
Jamel Debbouze : Non, non, bien sûr.
Jean-Charles : Et je trouve que c'est intéressant, parce que pendant une psychothérapie, ou quand on vient de voir, les gens peuvent avoir des situations très complexes, très difficiles. Et est-ce qu'on peut utiliser justement cet outil du rire dans toutes les situations ? Et quelles sont les limites ? Quels sont les conseils qu'on peut donner ? Et après, je serais intéressé de dire, est-ce que parfois tu as utilisé le rire, et en fait, il ne fallait vraiment pas utiliser le rire à ce moment-là ?
Dr. Panichelli : On prend un risque à chaque fois. C'est beaucoup plus dangereux d'utiliser l'humour et la provocation par rapport au patient que de juste rester silencieux et de faire « ah ah ». On s'engage soi-même et on rentre dans l'arène avec le patient. On s'implique beaucoup plus et c'est ça qui rend la thérapie intéressante. Je pensais que du coup on a vraiment un travail en équipe avec le patient et on ne le laisse pas juste tout seul à dire, bon, maintenant, on va voir ce que vous allez faire de mieux avec tout ça. Mais c'était quand même le début de la question.
Jean-Charles : Oui, il y a des situations où on ne peut pas le faire et où ça….
Dr. Panichelli : Ah oui, non. Alors, comme on disait tout à l'heure, à condition qu'on est capable de faire sentir au patient qu'on l'aime bien, qu'on est bienveillant, qu'on comprend sa situation et qu'on comprend pourquoi la situation le fait souffrir, donc d'être capable de se mettre à sa place, ça c'est une chose, ça c'est l'empathie, mais aussi de transmettre cette empathie, de faire sentir cette empathie, parce que même si on... On a plein d'empathie à l'intérieur, mais que le patient ne la voit pas, ne la sent pas, il peut continuer à croire qu'on n'a rien compris et qu'on est sur un piédestal en train de le juger. Donc il faut être capable de faire sentir ça.
Une fois qu'on peut faire ça, on peut rire de tout, de n'importe quoi, même de situations super tragiques. Je ne sais pas, quand les gens viennent chez moi et qu'ils ont un problème de deuil parce que quelqu'un de proche est décédé, souvent à partir d'un certain moment dans la conversation, je me mets à parler avec le mort en m'adressant au plafond. Et donc c'est des trucs tragiques, mais tout d'un coup, il dit « Ah bah ouais, t'as vu qu'est-ce qu'on va faire avec lui maintenant ? » Et alors ça introduit quelque chose de très décalé, et tout d'un coup de très surprenant, mais dans une situation complètement tragique.
Et c'est ça justement qui est intéressant, c'est que tout d'un coup, ils vont vivre la situation carrément d'une autre manière que celle dont ils la racontent d'habitude, et c'est triste, et on en pleure, etc. Donc on peut rire à peu près de tout, il y a sûrement des humoristes qui ont dit ça, mais oui, c'est ça qui a dit ça ? On peut rire de tout, mais pas avec n'importe qui. Moi, je dirais plutôt qu'on peut rire de tout, mais pas dans n'importe quelle relation, qualité de relation. Oui, c'est vrai. La qualité de relation qu'on a avec la personne.
Jamel Debbouze : Ça dépend de quoi est chargée la personne en face de vous.
Dr. Panichelli : C'est ça.
Jamel Debbouze : Évidemment. On n'est pas obligé d'avoir les mêmes idéologies pour rire ensemble. Mais s'il y a un endroit où vous êtes arc-bouté, c'est comme pour un ostéopathe.
Dr. Panichelli : Oui, c'est ça, oui.
Jamel Debbouze : Si c'est coincé, il faut passer par des massages, avant de faire craquer, vous voyez ce que je veux dire ?
Dr. Panichelli : Oui, oui, c'est ça.
Jamel Debbouze : Bon, pour faire craquer, j'en ai vu, moi, des très, très arc-en-bouté. Et ils changent d'avis, c'est ça qui est intéressant, ils finissent par bouger. Parce que le rire permet ça. T'as un jugement de valeur sur moi. Tu me trouves moche, petit, ce que tu veux. On échange. D'un coup, t'as un autre jugement de valeur tout de suite. Tout dépend de ce qui va sortir de ma bouche. Soit, ça va te conforter dans l'idée que t'as raison. Parce qu'en plus d'être petit et moche, je suis con. Bon, soit au contraire, j'ai dit une fulgurance, quelque chose qui t'a touché ou fait rire. Et là, il y a une connexion et d'un coup, il y a moins de jugement de valeur.
Dr. Panichelli : C'est ça, oui.
Jamel Debbouze : Il y a des moments où ce n'est pas du tout le moment de rire. Il y a des moments où c'est malvenu, c'était trop tôt. Tu vois, faire des vannes sur le 11 septembre, le 12, c'est un petit peu tôt. Tu vois ce que je veux dire ? Il y a des timings quand même à respecter pour, tu vois, physiologiquement, les trucs qui se reçoivent plus facilement que d'autres.
Donc, t'es dans une salle de classe, ton prof, il est là, il fait son cours, il s'est pris la tête, il a 25 gamins qu'il doit convaincre. Toi, tu fais une vanne. Super, ça détend l'atmosphère, ça. Tu fais deux vannes. Bon, OK, c'est bon, on a compris que t'étais marrant. Tu fais trois vannes, ça veut dire, un, t'as pas appris ta leçon et que tu perturbes les autres. Ça y est, stop. Là, t'es relou. Bon, il y a des moments où c'est pas le bienvenu et pour autant, c'est super agréable. Les gamins qui sont là, ils vont profiter allègrement de la banne. Ils vont rire. Ça va saouler le prof. J'étais ce gamin. Ça va saouler le prof. Au bout d'un moment, t'es chiant. Bon, voilà. Tu vois ? Quand tu veux absolument séduire. Quand tu veux absolument quelque chose. C'est souvent mal pari. Tu vois, tu fais penser à mon erreur à un moment, tu vas te précipiter.
Dr. Panichelli : Tu vas te précipiter. C'est la situation du pharaon.
Jamel Debbouze : Ouais, attends, Dr. Panichelli : on connaît les classiques.
Jamel Debbouze : Quand j'ai rencontré ma femme, j'étais le mec le moins drôle de la planète. Toutes les vannes que je faisais, elles étaient à côté parce que je voulais absolument la faire rire et c'était nul. Et tu sais, bizarrement, c'est ça qui l'a séduit. Il l'a touché parce qu'elle voyait que j'étais maladroit. J'étais pas mort. Il est pas mort, finalement. Non, mais là, j'ai perdu tous mes moyens. Et puis, j'insistais. Et là, mon pote, là, ça sert à rien. Il faut savoir sortir.
Jean-Charles : Oui, il faut savoir sortir.
Jamel Debbouze : Oui, oui, oui, oui. Il y a des moments où c'est pas le bienvenu. Là, je vais citer des trucs cools. Mais oui, je dis, le lendemain du 12 septembre, il y a des trucs, des vannes que tu fais pas. Bon. Et... Et c'est intéressant parce que ça pèse la civilisation. C'est ça être civilisé, c'est faire l'effort de lire la situation. C'est ta capacité d'adaptation, c'est l'intelligence.
Jean-Charles : Et on revient sur l'empathie vis-à-vis des autres en fait.
Dr. Panichelli : Oui,
Jean-Charles : c'est vraiment l'empathie vis-à-vis des autres, comprendre ce que tu peux faire vis-à-vis d'eux ou pas.
Dr. Panichelli : S'intéresser à ce qui va faire rire l'autre ou pas, quand c'est trop tôt ou pas.
Jamel Debbouze : Et puis le moment, le moment, le moment il est capital pour la vanne. D'ailleurs, quand on écrit un texte, c'est rythmé comme une partition de musique. Un silence peut être un rire incroyable, tu vois. Et si tu as choisi le mauvais thème au mauvais moment, tu vas t'acharner, mais tu vas gêner plus qu'autre chose.
Dr. Panichelli : Et ça ne marche pas ?
Jamel Debbouze : Non, c'est assez complexe.
Jean-Charles : Mais du coup, je suis intéressé aussi de comprendre, je pense qu'il y a pour beaucoup de personnes, et docteur... vous devez en voir aussi j'alterne entre le tutoiement et le vouvoiement mais…
Dr. Panichelli : plutôt sérieux
Jean-Charles : Il y a beaucoup de personnes qui ne savent pas comment commencer pour être drôle et pour faire de l'humour qui sont mal à l'aise dans cette situation comme vous disiez c'est se mettre un peu en risque est-ce que tous les deux vous avez des conseils pour commencer pour apporter un peu plus de légèreté face aux situations ... pour apporter de l'humour, comment vous le feriez ?
Dr. Panichelli : Moi, comme je vous l'ai expliqué tout à l'heure, j'essaie de me reconnecter aux souvenirs drôles que j'ai et aussi de regarder la personne avec un regard en disant « Tiens, mais qu'est-ce qu'il pourrait y avoir de chouette chez cette personne ? Qu'est-ce qu'il pourrait y avoir de drôle dans la situation qu'elle me raconte ? » de façon bienveillante et évidemment toujours en étant attentif si je me mets à sa place, est-ce que ça la fera rire ou pas.
Mais d'essayer d'avoir une humeur joyeuse pour aborder les choses. Parce que si moi déjà je suis dans la morosité ambiante, je me suis levé du pied gauche, etc. Aujourd'hui il y a plein de trucs qui ne vont pas et puis tout d'un coup allez venez rentrer. Alors l'ambiance est difficile dès le départ. Tandis que si j'accueille les gens en me disant elle est chouette, qu'est-ce qu'on va retrouver de bien ici et bien c'est très différent.
Jamel Debbouze : Moi je suis franchement d'accord avec toi l'humeur compte par dessus tout l'humeur dans laquelle on est pour aborder les choses c'est ce qu'il y a de capital il m'est arrivé de faire des bides une fois dans ma vie et puis il n'y avait personne non mais tu vois il m'est arrivé de faire des bides parce que j'étais de mauvaise humeur et uniquement parce que j'étais de mauvaise humeur.
J'ai mal joué la partition. La partition, pour moi, elle compte pas, si tu veux savoir même. Le texte, c'est le texte, bien sûr. T'auras des choses plus ou moins fines, tu vois, ou intelligentes, ou élégantes, ou percutantes, ou très très drôles, ou ce que tu veux. Mais c'est plutôt l'humeur dans laquelle je suis. C'est ça qui réussit à me mettre dans un état qui fait que je vais embarquer les gens. Si j'arrive ronchon...
Dr. Panichelli : Oui, c'est ce qu'on disait tantôt, c'est quand t'arrives au spectacle, super content, parce que tu sais que tu vas passer une bonne soirée, alors c'est bon.
Jamel Debbouze : Je me réveille la même temps, je me dis, je vais faire un malheur ce soir, et je fais un malheur ce soir. C'est vrai, parce que j'ai envie de communier, j'ai envie d'y aller à fond, je sais que ça va galer, je me dis, j'ai du matos en plus, pas importe ce que je me raconte, mais ça va rentrer.
Dr. Panichelli : C'est l'énergie qu'on a quand on est content d'aller passer une soirée avec des bons amis, avec qui d'habitude on rigole.
Jamel Debbouze : Moi, pour répondre à ta question... J'ai carrément... Bon, j'ai une réponse, mais j'ai même plus que ça. J'ai une méthode.
Jean-Charles : Allons-y.
Dr. Panichelli : J'ai bien fait de venir.
Jamel Debbouze : Très, très simple, que j'ai mis en place et qui a vu porter ses fruits régulièrement. Ça s'appelle le... Ça s'appelle le Jamel Comedy Club. Bien sûr, c'est vrai, c'est une salle, là, qui veut, vient. S’inscrit le mardi, à 18h. S'il a cinq minutes, il est le bienvenu. Alors, il faut qu'il ait le courage de monter sur cette scène. C'est la seule chose. Et ça, c'est lui et son humeur. C'est de quoi il est chargé.
Une fois qu'il a monté cette scène, et qu'il a fait ses 5 minutes, il est quelqu'un d'autre, tout de suite. Immédiatement. D'abord, il a fait preuve d'un courage incroyable. Sortir de chez lui. Traverser … Enfin, de faire le voyage. Je suis même pas là ! Il arrive devant la porte de cette salle. Je suis même pas là ! Elle lui met une pression du feu de Dieu cette porte. Parce que là sont rentrés plein d'artistes qui ont fait un malheur. Rentrer dans le couloir, aller parler avec le mec, c'est susceptible de le faire passer. Mettre son nom, attendre qu'on l'appelle, c'est à lui. Et là il y a 120 personnes qui le regardent. Pour la première fois de sa vie.
S'il passe ce cap... Il peut tout affronter dans sa vie, quasiment. Il ne sait pas que là, il vient de faire la chose la plus forte de son existence. En vrai, organiquement la plus forte. Au-delà de faire rire ou pas rire. Après, ça c'est, j'allais dire, ça va venir. Ou pas d'ailleurs. Mais que ça vienne ou pas.
Dr. Panichelli : d'oser y aller.
Jamel Debbouze : Il s'est transcendé. Le voyage l'a transcendé. Et j'aurais pu mettre en plus sur la porte du comédie club: “Attention, si vous franchissez cette porte, vous risquez de devenir riche et célèbre.”
Jamel Debbouze : C'est une vérité. Et d'ailleurs, il y aurait deux types de comiques à ce moment-là. Ceux qui focaliseraient sur “riche et célèbre” et ceux qui se focaliseraient sur “attention”. C'est comme ça que je les sélectionne. Il y a une sélection naturelle quand tu franchis la porte. T'as ceux qui se méfient un peu et ceux qui se disent putain, je vais être riche et célèbre. Et ils sont cuits, ceux-là, généralement, très vite.
Après, t'as deux... La salle provoque autre chose. Quand je te parle de vocation, je sais très vite quels sont ceux qui vont faire un effort, quels sont ceux qui vont arriver plus vite que les autres. Tu vas pas me voir là, mais attends, je te prends un micro, ça comme, téma. T'as la scène comme ça, disons que la scène... Elle est de là, voilà. Tu m'as là ? Disons que la scène, elle est de là à là, tu vois. Tu m'as plus là. Là, tu m'as là ?
Jean-Charles : Il est là-bas.
Jamel Debbouze : Bon, elle finit là. Elle commence là. D'accord ? Le public, il est devant. Il y a ceux qui vont jouer en fond de salle. Et je sais qu'ils vont mettre trois ans à arriver là. Et il y a ceux qui vont tout de suite arriver devant la scène et qui vont avoir envie de plonger dans le public quasiment. Et pourtant, ils ne sont pas drôles, ce n'est pas le problème. Mais c'est de quoi ils sont chargés.
Là, j'ai déjà deux réponses. Un, le courage. Ça, ils l'ont tous. Je les vois sur une scène et je les respecte d'avance. Donc, ils ont ma considération tout de suite. Après, j'ai mon indicateur. Je vois ceux qui jouent en avant scène ou ceux qui jouent en arrière scène. Et ensuite, vient l'humeur, l'envie qu'ils ont envie de faire. Est-ce qu'ils ont envie de communier ? Est-ce qu'ils ont envie de communiquer, de rire ? Ça, c'est l'humeur. Et c'est ce qui te permet de revenir chaque jour. Chaque jour. Chaque jour. Et un jour, t'es bon.
Je te jure, on a le même modèle que le Barça. On les trouve par terre. On leur file la selle du Jamel Comedy Club. Et un jour, s'ils sont très bons, ils finissent au Marrakech du Rire à Barnabéou. Et là, s'ils font rire au Marrakech du Rire, ils remplissent tous les Zéniths de France. Généralement, le cursus, c'est entre 5 et 7 ans.
Jean-Charles : OK.
Jamel Debbouze : 5 à 7 ans de dur labeur et de pratique pour remplir des zéniths. On va déconner quand même mais n'importe qui chargé de la bonne humeur on va dire ou qui est sur la bonne fréquence qui a envie de quelque chose au plus profond. Il faut quand même que ça soit un peu parce que se retrouver devant des gens et ne pas savoir quoi leur dire.
Tu as un client par jour et ça met la pression. D'ailleurs il est plus difficile de jouer devant une personne que devant mille parce que tu l'as dans les yeux, c'est pas pareil. Donc cette forme de spectacle qu'on donne, il faut être chargé émotionnellement très fort pour y retourner chaque jour.
Dr. Panichelli : Voilà j'ai eu un beau bide moi cette semaine, tu parlais des bides c'est une patiente qui était perfectionniste, alors il faut toujours essayer de les modérer etc. Je lui ai balancé comme ça ah oui c'est parce que vous aimez bien les choses bien faites comme le camembert c'est complètement tombé à plat. Ça me fait penser à la chanson de Bobby Lapointe, le camembert, c'est bon quand c'est bien fait. Vive l'amour ! Ça me fait rire tout seul, mais c'est bien. Jean-Charles : Moi, c'est revenu sur Bobby Lapointe.
Dr. Panichelli : Ravi d'être entre connaisseurs. Jean-Charles : Et il est mort. J'ai levé mon pied. C'est la meilleure.
Jamel Debbouze : Ouais Bobby la pointe. Jean-Charles : Mais en parlant de musique. Et le bide comment tu l'as géré ?
Dr. Panichelli : C'est passé tout seul parce qu’elle s’est rendu compte de rien. Mais moi ça me faisait rire intérieurement.
Jamel Debbouze : Oui mais tu vois toi t'es chargé émotionnellement de la bonne humeur. C'est ça qui compte. T'as envie de transmettre quelque chose de positif en tout cas. Et c'est peut-être ta manière de te protéger vis-à-vis de tes patients. Mais c'est de toute façon la seule manière d'être quand tu prônes ce que tu prônes. Pardon mais... Mais on est obligé nous d'être sur la pointe des piliers, tu vois ce que je veux dire, relativement prêt à recevoir.
Dr. Panichelli : Oui c'est ça.
Jamel Debbouze : Tu vois, comme des tennismans.
Dr. Panichelli : Oui tout à fait,
Jamel Debbouze : il faut renvoyer la balle à chaque fois.
Jean-Charles : Toi est-ce que tu as une pression d'être toujours drôle ? Ouais. Même dans ta vie perso ? Jamel Debbouze : Ouais, ouais et la plupart du temps tu sais je suis neutre moi dans la vie.
Jean-Charles : Je te trouve quand même assez drôle quand on te voit.
Jamel Debbouze : Ouais t'es gentil, mais on est d'une nature, toi aussi t'as un rieur et toi aussi t'es marrant. évidemment tu vois on n'a pas le même style non mais si je te jure il m'a réveillé de rire on était tous les deux et pas de caméra rien c'est pas pour te faire plaisir hein quand je suis surpris je suis surpris de toute façon tu vois je suis bon rieur et très bon client ça c'est vrai mais je ne ris pas intérieurement facilement je ne sais pas si tu vois la différence tu vois je suis poli tu m'as dit tu m'as entendu me dire que tu as été poli avec moi non pas du tout pas du tout justement je te fais la démonstration.
Je ris de bon cœur c'est sûr. Mais je pense que je vais plus facilement vers les gens qui rient et qui font rire. Ça c'est vraiment pas cool. Parce qu'il y a une espèce de sélection naturelle. C'est terrible ce que je veux dire. Mais c'est pas sur des caractères morphologiques. Mais sur un comportement. Quelqu'un de renfrogné, quelqu'un de fermé. Il ne va pas m'attirer. Et je ne veux pas avoir forcément envie de... Ou quelqu'un qui me donne le sentiment de me juger parce que je suis complexé.
Ah oui, c'est important le complexe. C'est un moteur extraordinaire. Le complexe. Oui, ça dépend ce que tu en fais encore une fois. Mais moi, ça m'a servi de bimoteur, le complexe. Je ne suis pas 1m65, ta gueule, ta gueule. Je ne vais rien faire, tout fait. si tu le fais je peux faire 1m65 tu vas pas accepter au bout d'un moment après tu vas être rassuré en disant Napoléon Bonaparte aussi, Maradona aussi Al Pacino aussi on est bien.
Je digresse les compagnons de route sont extrêmement importants les gens dont tu t'entoures pour garder l'humeur comme un frigo ou un four peu importe. Mais les gens qui t'entourent sont extrêmement importants là-dedans, dans ta mécanique et dans ton schéma mental et dans ta prédisposition à être drôle ou pas. Et voilà.
Jean-Charles : Et du coup, une des meilleures manières pour être drôle, c'est de s'entourer de gens drôles.
Jamel Debbouze : Oui, c'est d'être dans un univers de gens qui te désacralisent, qui te désamorcent et qui ne sont pas là à se morfondre. Bien sûr que c'est dur, tout est dur, frère. Dès lors que tu es sorti du ventre de ta mère, c'est cuit.
Jean-Charles : C'était déjà dur de sortir.
Jamel Debbouze : C'était dur de sortir. Moi, j'étais bien là-bas. Mon meilleur choix, c'était celui-là. Comment c'était bien ? Bon, à partir du moment où je dois me sociabiliser, je suis donc composé avec vous tous, là. Le danger, c'est les autres. C'est pas moi, c'est sûr. Bon, c'est ce qu'on se dit tous. Tu commences à être en méfiance.
Et pour te détendre, je pense, face au monde qui est très, très, très dur, c'est les gens. Tiens, je te regarde, ça me rassure. Il est cool, c'est sûr, il ne me veut pas de mal. Je vais faire une vanne, il va rire. Il va en faire une, je vais rire. Je vais bien me tailler une bavette avec lui. Ça participe de tout. On se sociabilise et on est mieux que si on entourait de gens qui sont positifs.
Dr. Panichelli : C'est contagieux. C'est ça qui est intéressant avec le rire et l'humour. Ça met tout le monde de bonne humeur. Si soi-même, on a ce côté contagieux, on va pouvoir... Mettre la bonne ambiance ?
Jamel Debbouze : Ouais.
Dr. Panichelli : C'est très banal de dire ça, mais...
Jamel Debbouze : Mais, c'est très banal, mais je te jure, tu sais, on voit souvent sur TikTok des expériences à deux balles. J'ai fait et ça marche, hein. Tu prends deux pommes, t'en mets une dans chaque pied, dans une pièce différente. Il y en a une qui dit, t'es moche, t'es pas une pomme, t'es une banane, si tu veux savoir. Tu... J'ai jamais vu une pomme aussi moche que toi. L'autre, tu lui dis, t'es belle, t'es la plus belle des pommes, t'es... t'es pas une pomme, t'es une pêche.
Il y en a une, tu la charges d'amour, l'autre, tu la dégueulasses. Je te jure, elles sont nées le même jour. Il y en a une qui va flétrir plus vite que l'autre. Faites cette expérience. Faites cette expérience, c'est organique. Les ondes négatives, ça existe. Et celles qui te parviennent, elles te font du mal. Tu vas me dire un truc pas cool, c'est pas cool. Ça va me mettre dans un pas cool. Tu me dis un truc sympa, cool. Même si tu ne penses pas, ce qui me parvient, c'est que...
Pareil pour l'humour. C'est une onde positive qui te parvient, elle est émise par quelqu'un de cool pour rendre l'atmosphère cool. Ou, à contrario, c'est un mépris, c'est une moquerie et... Tu vois ? Donc, toute une question d'ondes, c'est sûr.
Dr. Panichelli : En plus, on est sur les ondes, donc ça tombe bien de le dire.
Jean-Charles : Je ne vais pas faire d'ondes, mais... N'est-ce pas ? Jamel, tu as lancé le Jamel Comedy Club, le Marrakech du Rire. Est-ce que tu penses que l'humour devrait prendre une place encore plus importante dans nos sociétés ? Comment on fait ça ? Docteur aussi, je serais ravi ensuite d'avoir votre vision sur... Est-ce que vous engagez ensuite vos patients à être des vecteurs d'humour autour d'eux ?
Jamel Debbouze : Oui, avec un O majuscule. Tu peux m'arrêter là. Évidemment. Évidemment que le rire doit être beaucoup plus présent dans nos sociétés. Il doit être nourri. Il doit être mis en valeur. Et on doit appeler les gens à rire ou à faire rire. J'en suis convaincu. Comme à danser. Comme à faire du sport, tu vois, à vivre.
Il n'y a pas beaucoup de niches comme ça où on est tous d'accord pour dire que ça fait du bien. Tu vois, c'est vrai. Quand on danse tous ensemble, quand on chante tous après une Coupe du Monde, tu vois, quand on est tous à l'unisson à faire un truc joyeux, c'est génial. Regarde, quand tu regardes un match de foot, d'ailleurs, il n'y a rien de plus fort qu'un but en Coupe du Monde, cette espèce d'élan que tout le monde a en même temps. Tu vois,
Jean-Charles : Que d’un côté du stade.. Jamel Debbouze : Et le rire, c'est pareil. On prend un jeu tous en même temps et j'ai l'impression que ça nous fait tous en même temps du bien. Bien sûr qu'il faut le nourrir, il faut l'éduquer. La meilleure manière de propager ça, c'est éduquer nos enfants dans une bonne ambiance à la maison. Ça commence par là. Ne faites pas vivre à vos enfants vos problèmes. Mentez-leur. Inventer des histoires, rentrer dans des personnages, mais filer leur du beau, du bien, du féerique, ou en tout cas, bien sûr que, ne vous inquiétez pas, la vie va se charger de leur montrer ce que c'est que la vie, ce n'est pas le rôle des parents de faire ça en vrai, tu vois.
Nous on est là pour les protéger, les éduquer du mieux qu'on peut, les civiliser, tu vois. La meilleure manière de civiliser un enfant, c'est de lui apprendre qu'il ne faut pas avoir peur de l'autre, qu'il faut aller vers l'autre, qu'il n'y a pas de différence. L'exemple que je vous filais avec le ballon, si tu arrives avec un sourire, il y a de grandes chances qu'on t'accueille avec un sourire. Et ouais, moi je pense que vraiment, il faut, dans notre éducation, dans nos écoles, j'ai essayé, je me suis battu pour rentrer l'improvisation théâtrale dans les collèges, à la place du... pas la place, pardon, mais en complément du cours de théâtre, ou le LV1. N'importe quel LV1. Ou LV2. Mais tu vois, un cours...
Jean-Charles : On pourrait mixer deux improvisations théâtrales en allemand.
Jamel Debbouze : Mais moi, je donnais des cours d'improvisation théâtrale au collège à Trappes et je sais que j'ai impulsé des choses. Il y a des gamins qui se sont dit, je veux faire ça. Aujourd'hui, ils en vivent. Je te prends Alban Ivanov, qui remplit tous les Zeniths, Issa Doumbia. Sophia Aram, tu vois des gens qui sont Arnaud Tsamer, qui viennent de l'improvisation théâtrale et qui sont sur les routes aujourd'hui avec 50 techniciens, donc qui nourrissent 50 familles, grâce au rire, tu vois, et les autres, ça leur a permis de prendre confiance en eux, c'est certain, et ils abordent la vie 100 fois plus sereinement que quelqu'un qui n'a pas eu à travailler son son intérieur, je ne sais pas comment on appelle ça.
C'est vrai, aller chercher de la confiance en soi, c'est extrêmement important pour le monde qui nous entoure. Là, il est dur quand même, tu vois. On passe notre temps à se faire écraser par plein de choses. Donc, si on n'est pas fort de soi, on est cuit. Et je pense que la société devrait absolument travailler sur le rire, parce que c'est un moyen de communication très fort.
Dr. Panichelli : Tout à fait.
Jean-Charles : Et c'est quelque chose que tu conseilles à tes patients, du coup ?
Dr. Panichelli : Alors moi je suis surtout intéressé par... Enfin moi mon travail c'est aider le patient à s'en sortir avec sa propre situation. Et si on fait ça avec de l'humour et du rire c'est génial parce que c'est beaucoup plus agréable pour tout le monde. Et en plus ça apporte plein de choses, ça permet d'être créatif, de se reconnecter à son énergie intérieure, à regarder la situation sous un regard neuf et à trouver des solutions qu'on n'avait pas pensées avant. Mais je pense... Comment dire ? Ça s'arrête là quelque part. Mais après... Donc je ne les envoie pas dans le monde après pour coloniser, être des ambassadeurs du rire, mais ça pourrait en fait, ça pourrait. Mon travail il s'arrête à est-ce que le patient se débrouille mieux avec sa situation, est-ce qu'il va mieux ?
Mais je pense qu'en effet de toute façon si le patient qui vient chez moi retire quelque chose de cet ordre-là, c'est compliqué ce qui m'arrive, j'ai de la souffrance avec ça, j'en suis triste, etc. Mais j'ai réussi à en rire. Il y a une patiente, il n'y a pas longtemps, qui était là et qui me racontait un truc vraiment très pénible qui venait de lui arriver. Et comme elle est déjà venue plein de fois, elle sait que je la fais rire de temps en temps. Alors elle me regardait comme ça, en racontant le truc hyper triste, et puis avec un rire en disant « Ne me faites pas rire, ne me faites pas rire, ne me faites pas rire, c'est rare de me faire rire avec ça. »
Et moi, je n'ai rien fait, j'ai juste eu un petit regard un peu bizarre, et bien ça y est, elle a commencé à rire avec le truc alors que je n'avais rien dit. Donc je pense que quand les gens découvrent ça, après ils peuvent l'apporter ailleurs aussi, sans doute quand ils parlent avec les gens de leur famille, avec leurs amis qui parfois aussi sont dans des moments difficiles.
Jamel Debbouze : Prenons le monde de l'entreprise. On a souvent entendu que c'était extrêmement dur. Je me souviens bien de la séquence télécom où les gens se suicidaient quasiment parce que le monde de l'entreprise est un monde extrêmement dur. On a fait des tests. Tu pourrais le faire chez toi. Jean-Charles : Oui, c'est vrai. Dis-nous.
Jamel Debbouze : On pourrait même, je vous jure...
Jean-Charles : Et on fait un papier scientifique après. Jamel Debbouze : Mais pourquoi pas ?
Dr. Panichelli : J'ai plaisir.
Jamel Debbouze : Franchement, j'insiste avec l'improvisation théâtrale parce que c'est l'outil le plus facile. Jean-Charles : Mais faisons un cours d'improvisation théâtrale avec tous les Alaners Jamel Debbouze : Alors là franchement avec plaisir. Mais pour que ça porte ses fruits un cours ne suffira pas. Non mais on fait une série. Et tu pourras le tester. Tu pourras le voir par toi-même. Tu vas avoir une évolution psychologique et physique s'opérer.
D'abord partager des choses qu'on n'a pas l'habitude de partager avec les collègues. Montrer une autre facette de soi. Donc quelque part aller vers l'autre. Parce que je te fais confiance, là je te montre quelque chose que t'as pas l'habitude de voir, j'espère que t'as pas l'habitude de juger. De toute façon, plus ou moins. Et si tu me juges pas, j'ai un bon âge, tu vois. Et si toi aussi tu me montres un truc que j'ai pas l'habitude de voir, d'un coup, on est... Il y a un truc qui se passait pas il y a 15 jours, alors que t'étais en face de moi.
Et il y a quelque chose de très libérateur, et quand je te dis que ce simple outil qu'est l'improvisation théâtrale, parce que ça fait appel à beaucoup d'exercices physiques, psychiques, empathiques... Tu vois, il y a énormément de choses à faire à l'impro. Quand tu mets l'improvisation de ta trace dans un groupe qui a déjà fonctionné, qui a ses habitus, tu vois très vite qu'il y a d'autres choses qui se développent, il y a d'autres choses qui arrivent. Et généralement, c'est hyper bénéfique pour le groupe. On a envie de faire un truc ensemble et on a envie maintenant d'atteindre un objectif ensemble. Tu vois ?
Et ce truc où on ne se juge pas... Et bien, cet endroit où on ne se juge pas, on a envie d'y retourner tous les matins. Ça change tout, je te jure. Donc, à ta question, est-ce que le rire devrait être développé partout ? Oui, mais le rire comme ça, ça ne veut rien dire. Des outils, je ne sais pas comment on peut appeler ça, d'apaisement social.
Dr. Panichelli : Oui, de bienveillance.
Jamel Debbouze : Oui, de bienveillance. De bon jugement. Exactement. Ils sont à notre disposition. C'est con comme la lune, il suffit de les mettre en pratique et une fois que c'est fait, les bienfaits sont prodigieux. C'est comme quand on te dit « mange des fruits et légumes ». Très con comme conseil, tu vois. Mais c'est un très bon conseil.
Dr. Panichelli : Ça a l'air un peu barbant comme ça, mais après on se sent mieux quand même.
Jamel Debbouze : Oui, exactement. Et bien pareil, faire appel à l'improvisation de ta femme, ça peut paraître ridicule, mais je vous jure que ça a un effet concret, physique sur la société.
Jean-Charles : On ne devrait pas dire aux gens de manger des fruits et légumes, on devrait montrer comment ça peut être très bon, les fruits et légumes. Mais je suis d'accord avec toi sur l'improvisation théâtrale, on va le faire chez Alan, et même, si ça t'intéresse, on va construire du contenu qu'on va donner à toutes les entreprises qui utilisent Alan, et comme ça, on va mettre le rire partout dans notre pays.
Dr. Panichelli : Ça ne m'arrange que moyennement, parce qu'après, tous ces gens n'auront plus besoin de venir chez moi.
Jamel Debbouze : Non, mais c'est intéressant. Vous pourriez, sur un ou deux de vos patients, essayer l'improvisation théâtrale mais l'accompagner. C'est une mise en abîme. Je ne sais pas si ça peut être intéressant pour vos travaux.
Dr. Panichelli : L'accompagner au...
Jamel Debbouze : Oui. Oui, oui. Déjà, ça casserait toutes les barrières, ça c'est certain.
Dr. Panichelli : Oui, c'est sûr.
Jamel Debbouze : Et... de voir comment lui réagit. Parce qu'à la fin de ce cours, il se sera passé quelque chose de nouveau entre vous, et quelque chose de nouveau pour lui organiquement, ou elle. Et je trouve intéressant, il n'y a personne qui reste insensible à avoir joué quoi que ce soit devant un public.
Jean-Charles : Mais dans ce que tu dis, je pense qu'il y a deux choses. Il y a ce que tu te construis quand tu te mets devant un public, mais il y a aussi l'improvisation, je pense qu'elle est très intéressante, parce que c'est... Comment réagir à des situations que tu ne maîtrises pas ? Et en fait, ce qui stresse les gens, c'est la non-maîtrise de leur calendrier. C'est le nouveau sujet ou le nouveau problème qu'ils n'avaient pas envie de gérer et en fait, qui arrive en plus. Et si tu arrives à prendre toutes ces situations avec un peu plus de recul et d'humour, en fait, tu es aussi beaucoup mieux dans l'entreprise. Bien sûr. Parce que l'entreprise, en tout cas l'entrepreneuriat et l'entreprise, c'est l'improvisation permanente. Bien sûr. Tu dois inventer des nouvelles choses en permanence.
Dr. Panichelli : Et le problème principal,
Jamel Debbouze : Un des gros problèmes qu'ont beaucoup de gens, c'est qu'ils ne savent pas parler en public. Ils sont tétanisés face à un interlocuteur. Jean-Charles : C'est un truc qui tétanise beaucoup de gens.
Jamel Debbouze : Oui, il y en a beaucoup qui savent intérieurement la réponse. Ils l'ont en fond d'eux-mêmes. Il n'y a aucun problème avec le problème. Tu vois, j'ai la solution. Mais je n'arrive pas à l'exprimer parce que tu me tétanises. Je me sens inférieur à toi. Alors que c'est toi qui te racontes cette histoire.
Dr. Panichelli : Oui, c'est ça.
Jamel Debbouze : Mais dès que tu en as conscience, tu n'es plus du tout inférieur à qui que ce soit.
Dr. Panichelli : Oui, on peut le changer soi-même.
Jamel Debbouze : Oui, ça change tout dans le rapport au monde.
Dr. Panichelli : Tout à fait.
Jamel Debbouze : Très, très philosophique cette conversation. Je vais interdire la diffusion de ce truc. On va en prendre pour un interro. Non, mais merde, ça m'a niqué mon image.
Dr. Panichelli : Non, mais c'est vrai, ils ont l’air hyper zen. Je suis d'accord. Jean-Charles : Je t'envoie l'aussi.
Dr. Panichelli : Avec moi qui n'en ai pas.
Jamel Debbouze : Ah non, vous disiez,
Dr. Panichelli : vous disiez.
Jean-Charles : En parlant de choses ultra intellectuelles et philosophiques, j'ai lu sur le yoga du rire. Qu'est-ce que c'est ?
Dr. Panichelli : Je ne connais pas super bien, mais j'ai expérimenté une fois cette année.
Jamel Debbouze : Yoga du rire ?
Dr. Panichelli : On avait déjà parlé beaucoup. Donc c'est une forme de relaxation, si on peut dire, où les gens se mettent ensemble pour rire sans raison. Donc ils s'entraînent à rire en faisant des gestes, il y a différents exercices, etc. et où ils passent une heure ensemble à rire de plein de manières différentes, mais sans qu'il y ait d'humour derrière, si on veut. Donc c'est une forme d'exercice physique.
Jamel Debbouze : C'est physique, voilà. Dr. Panichelli : C'est pas dur du tout, en fait, franchement. C'est un peu comme l'impro. Non, c'est pas faire semblant, c'est s'entraîner à rire comme ça, mais sans raison. Et donc ça provoque une détente. Et puis comme c'est en groupe, c'est contagieux, et alors du coup tout le monde se met à rire. C'est très impressionnant comme expérience.
Jean-Charles : Vous allez être génial comme sensation.
Jamel Debbouze : Le début, il est en côte un peu.
Dr. Panichelli : Et puis ça va de mieux en mieux, mais comme ça.
Jamel Debbouze : Je suis mal à me garer. Et après, je suis dit par un connerie, c'est une méthode, je vais m'en s'en aller.
Jean-Charles : Petite pratique.
Dr. Panichelli : J'encourage, oui, tout à fait, c'est intéressant comme expérience.
Jean-Charles : On parlait de Bobby Lapointe tout à l'heure. Tu m'as aussi dit que parfois tu utilisais la musique et le rire dans tes consultations. Comment ça se passe ? Est-ce que tu veux nous donner un petit exemple ?
Dr. Panichelli : Je vous ai apporté une petite chanson. Je vous préviens tout de suite, c'est un peu trash. Parce que la chanson s'appelle « C'est quand on le vomit ».
Jean-Charles : On a commencé par l'hémorroïde, on va finir par le vomi. On a parcouru tout le corps humain.
Dr. Panichelli : Et c'est sur il y a vraiment pas de case de santé on fait un check-up complet ouais mais on sera percés par toutes les sécrétions donc on n'en fera que deux aujourd'hui on va en laisser aussi pour demain c'est sur l'ère de la chanson de Cali c'est quand le bonheur il y a une guitare aussi dans celui-là ah on a le droit on s'avoue de et tu chantes aussi bien sûr. Oui, alors je n'ai pas beaucoup de voix aujourd'hui, donc il faut m'accompagner pour le refrain.
Jean-Charles : Je ne vais pas faire ça pour nos auditeurs, mais je laisserai les gens compétents le faire.
Jamel Debbouze : Moi, je refuse de me ridiculiser, donc je vais les écouter.
Dr. Panichelli : Ce n'est pas difficile du tout, parce que c'est le temps, c'est quand le vomi, c'est quand le vomi.
Dr. Panichelli : Alors d'abord, il faut que j'explique un peu quand même la situation de cette patiente. Donc c'est une patiente qui a une phobie de vomir. Ça lui vient de quand elle était adolescente ou elle a assisté à l'accident de la route de son petit ami qui est mort dans cet accident de la route et juste avant de mourir il a vomi. Elle a vu ça. Et forcément que ça a été quelque chose de terrible, de traumatisant pour elle.
Mais donc des années plus tard, elle se marie, elle fait des enfants, etc. tout va bien. Mais elle a une phobie du vomi et ça devient vraiment quelque chose d'handicapant pour elle parce qu'elle se met à éviter certains aliments, à éviter certaines combinaisons d'aliments, à éviter toutes les situations où peut-être elle pourrait être malade, et c'est vrai, et c'est vrai.
Et alors ses enfants, tout d'un coup elle a des enfants, alors ils attrapent des gastros, alors qu'elle dit pour nettoyer leur vomi ça ça va, j'ai pas de problème, mais moi j'ai peur de l'attraper moi-même et après de vomir moi-même. Et donc elle se met à abuser d'anxiolytiques, des choses comme ça, ça devient un problème qu'elle trouve suffisamment important pour consulter, et donc c'est à ce moment-là qu'elle arrive chez moi.
Et donc on fait quelques consultations, donc je la connais bien, je lui fais des vannes là-dessus à certains moments, etc. Elle est dans mon livre d'ailleurs. Et puis à un moment, je me dis que je vais lui écrire une petite chanson, et puis je ne sais pas pourquoi, je pense à la chanson de Kali que j'ai sans doute entendue à ce moment-là, qui est « C'est quand le bonheur ? » et ça devient « C'est quand le vomi ? »
Il faut que je m'habitue à la guitare. Je suis pendu à vos lèvres, espérant le mi, espérant le miracle qui me sauverait du vomi. Je suis pendu à vos lèvres, mais qui a-t-il de plus moche qu'un grumeau de vomi qui passe par les narines et se décroche ? Je suis pendu à votre seau, il est prêt, je l'ai mis là pour cette petite gastro, si jamais elle passait par là. Je suis pendu à votre seau, et je guette la nausée. Je voudrais savoir quand l'oiseau de mon vomi va se poser.
C'est quand le vomi... Avec moi hein. C'est quand le vomi. C'est quand le vomi. C'est quand le vomi.
J'étais faite pour le bonheur, les vacances, les enfants. Mais voilà j'ai mal au cœur, j'ai la gerbe franchement. J'étais faite pour le bonheur mais la vie m'a envoyé. Tellement de baffes à la gueule que je m'en vais la dégueuler.
Alors je guette, je guette pour voir quand il va pleuvoir. Oui je sais, c'est de la merde qui va remplir ma baignoire. Mais je m'en fous, je surveille tous les gens de ma famille. Je suis pas contre une merveille du moment que c'est du vomi. C'est quand le...
Jamel Debbouze : Alors franchement, elle a entendu ça votre patiente ?
Jean-Charles: Ben oui, ça décoiffe quand même.
Jamel Debbouze : Ben elle a dû être touchée. Dr. Panichelli : Ça c'est le truc qui me surprend moi dans ces histoires de chansons, c'est que les gens sont souvent très émus en fait. Même si je balance un truc comme ça complètement en trash, ils sont émus que j'ai passé du temps pour eux à écrire ça, ça veut dire que j'ai pensé à eux entre deux consultations. Ils sont émus que j'ose montrer une autre facette de moi, je sors de mon rôle complètement. Voilà. Plus le thérapeute hyper sérieux qui écoute tout ça. Et donc...
Jamel Debbouze : Ah, c'est intéressant, franchement.
Dr. Panichelli : Ben voilà, merci.
Jamel Debbouze : Non, mais c'est vrai, je me mets à la place de cette personne. Je me dis...
Dr. Panichelli : Ah, mais ce qui se passe, c'est que du coup, elle est obligée d'écouter la réençon, et puis elle se regarde comme dans un miroir, un peu, parce que je décris comment elle gère la situation. Et donc, par exemple, cette patiente-ci, elle était un peu émue, mais alors après, à la fin, elle m'a dit, c'est tout à fait ça. C'est carrément incroyable pour moi parce que moi je suis dans l'histoire de l'humour et j'ai exagéré complètement à la grosse louche et tout.
Et puis elle en fait elle a été touchée parce qu'elle s'est sentie comprise par ce que j'ai décrit. Et puis après par exemple ce jour-là elle m'a dit mais en fait moi ça me fait penser que j'aurais le droit d'être faible. Et là je trouve ça génial que donc elle écoute la chanson et puis en fait il y a des choses qui percolent pendant qu'elle écoute ça. Ça la fait réfléchir par rapport à sa propre situation. Et elle réalise que peut-être elle a toujours essayé d'être forte, d'essayer d'être forte par rapport à toute la situation, et qu'il faut qu'elle lâche quelque chose de ça par rapport à son angoisse, et qu'il faut qu'elle s'autorise aussi à un certain moment à avoir le droit d'être faible. Donc ça, ça fait progresser la réflexion de la thérapie par rapport à là où elle en est avec sa difficulté.
Jamel Debbouze : Avoir le droit, c'est quand même quelque chose de récurrent, ça. On ne s'autorise pas. Et souvent, on... On est très heureux quand quelqu'un nous met le doigt dessus et nous dit tout bêtement, mais tu peux, tu vois. Il n'y a personne qui te l'interdit, vas-y, go. Et je te jure, c'est bête, mais je trouve ça super comme démarche.
Dr. Panichelli : Merci beaucoup. C'est ça l'impro aussi, en fait, c'est vas-y, tu peux.
Jamel Debbouze : Ouais.
Dr. Panichelli : Et en thérapie, nous, c'est aussi ça. Quelque part, c'est les gens qui sont là, qui sont complètement coincés dans un truc, ils n'osent pas aller dans la vie, etc. Et c'est de leur dire, mais allez-y. D'ailleurs, c'est la petite phrase que je lui ai mise dans ma dédicace, que tu as dit un jour, t'as aucune chance, alors sais-y-la. C'est vraiment ça, c'est se révolter contre tout ce qui nous bloque et oser être créatif et y aller quand même. Et tu peux y aller.
Jamel Debbouze : C'était dans un de mes spectacles. Oui, c'est un conseil d'orientation à qui je faisais dire ça.
Dr. Panichelli : Ah oui ?
Jamel Debbouze : Et je lui ai dit que si tu veux faire dans la vie, je vais être astronaute. Il a rigolé. Il a dit quoi ? Qu'est-ce qu'il y a ? Ils ont bien envoyé des singes. Il y a de le place de tout le monde. Tu vois, donc franchement, si lui il y arrive... Mais je suis sorti de chez le conseiller là. Il dit, bon bah t'as aucune chance alors saisis la. Allez go. Ça n'a rien d'attendre à qui que ce soit. Et j'ai jamais attendu après qui que ce soit. Et la résilience aussi. La résilience dans tout ça c'est quand même un truc assez incroyable je trouve.
Dr. Panichelli : C'est de ça qu'on parle tout à l'heure en fait. S'adapter à toutes les situations compliquées qui nous tombent dessus. Et c'est ça être résilient.
Jamel Debbouze : Ouais, ne pas accepter. Ne pas accepter le sort. Le sort, comme s'il y avait des sorcières partout. Non mais c'est vrai, tu n'y arriveras pas, tu l'as entendu ça ? T'es pas fait pour ça frère, laisse tomber, laisse tomber, laisse tomber, c'est le plus ouf ! Bon on m'a dit laisse tomber plein de fois, non mais ça va être trop dur. Et je sais pas comment on se sort de ça, mais... Je pense qu'avoir confiance en soi, c'est la première marche, mais encore faut-il y aller.
Jean-Charles : Et ça se construit.
Jamel Debbouze : Oui.
Dr. Panichelli : Et ça se construit, entre autres, quand on lance un défi aux gens, comme quand il faut monter sur la scène de l'impro. C'est lancer le défi de dire, allez, vas-y, essaye. T'es capable aussi, on verra bien ce que tu vas faire, mais ça m'intéresse. Montre ce que t'as dans le ventre.
Jamel Debbouze : Moi, je trouve une à deux pépites par jour. Je vous jure, on est d'artistes incroyables qui vont faire carrière s'ils ont envie. Et au départ, c'est toujours un peu la même chose, c'est très timide, mais il y a un truc, et on s'intéresse un peu à eux, et ça suffit.
Jean-Charles : Il faut quelqu'un qui donne la petite graine de confiance, et après ça, Jamel Debbouze : Et c'est en toi. Quand même, la résilience, il y a quelque chose à l'intérieur qui est du ressort du nucléaire, c'est une petite goutte. Non mais c'est vrai.
Dr. Panichelli : Mais tu peux se nourrir de regards confiants de l'eau.
Jamel Debbouze : C'est comme le curcuma. J'ai appris qu'il ne savait rien sauf si tu mets du poivre. Le curcuma il révèle toute sa puissance au contact du poivre. S'il n'y a pas de poivre, ça reste un curcu. Tu mets du poivre et là...
Je pense que vraiment on a tous à l'intérieur, on est tous un peu du curcu. Il faut qu'on croise le bon poivre. Et je suis convaincu de ça moi. Je suis sûr que là, on est 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7. Et on a 7 puissances différentes. On a un talent certain chez chacun. Après, la flemme d'aller le chercher, les opportunités qui ne se présentent pas, l'entourage qui dit... Et puis...
Dr. Panichelli: Attention, attention.
Jamel Debbouze: Et le pire des ennemis, sa race, la paresse.
Jean-Charles : Parce que les opportunités..
Jamel Debbouze : La paresse, la bourgeoisie. On vit dans un pays riche malgré tout je vois il y a des opportunités qu'on file ici c'est vrai je peux le comparer par exemple à des cours que j'ai donné au Sénégal au Maroc on a été dans les quartiers populaires en France je vais même pas aller jusque là les endroits où on a moins. Les gens, ils donnent plus. Ils donnent vraiment plus. Franchement.
Et je le vois à Paname, il y a une forme... On est un peu repus à plein d'endroits. Culturellement, on est bombardés de choses. Donc on n'a pas besoin d'aller vers elles. Elles viennent vers nous, naturellement. Le contexte géographique dans lequel on évolue nous file aussi quelque chose, j'ai l'impression. Et socialement, la classe dans laquelle on évolue aussi. Et je ne parle pas de pauvres ou de riches. La famille compte aussi. Le contexte géographique, il est super important pour sortir du marasme.
Jean-Charles : Je reviens, c'est la résilience. Passer, tu dis, les opportunités, elles arrivent si tu es résilient. Il faut juste aller continuer tant qu'elles n'arrivent pas.
Jamel Debbouze : Ou ouvrir. Tu sais, l'humeur dont on parlait tout à l'heure. Tu ne peux être drôle que si tu es de bonne humeur. Si tu es fermé à l'intérieur de toi, tu ne vas pas entendre la phrase marrante qu'il a dit sur laquelle tu pourrais rebondir. Tu ne vas pas...
Jean-Charles : Et tu as des exercices, chacun de votre côté ? Il y a des matins où vous n'êtes pas là et tu n'es pas là et il faut pourtant de l'énergie pour tes patients. Toi, tu es de mauvaise humeur. Qu'est-ce que tu fais pour te transformer, te relancer ?
Jamel Debbouze : J'appelle mon banquier. Je sais où j'en suis, tu vois. Ok, à ce point, je vais me lever. Ça dépend des agios. Non, non, tu sais, moi j'ai eu un moteur, c'est vrai, j'ai eu un moteur formidable. J'ai eu cette chance, c'est de vouloir aider ma mère à tout prix à payer ses factures.
Je n'étais pas fait pour être artiste, je n'avais pas prévu d'être artiste. Je ne savais pas ce que c'était. Il n'y avait jamais eu aucun artiste dans ma famille. Pour moi, artiste, ça n'existe pas. C'est une lubie. C'est un mec qui se réveille et qui se dit « Tiens, je vais faire n'importe quoi ! » Et ça va plaire aux gens. C'est ça l'artiste, tu vois.
Dr. Panichelli : Au bout du compte, c'est hyper...
Jamel Debbouze : C'est pas payé, c'est pas rémunéré, c'est chelou. Pour moi, mon père, mon père passait les balais, il passait le balai dans les métros. Ma mère était femme de ménage, mon grand-père était commerçant, maçon, ma sœur. C'est tous les mecs de son équipe. Non, mais c'est vrai.
Et puis, pareil pour les études. Je n'ai jamais eu autour de moi, malheureusement, dans la famille, des gens qui ont fait des études. Donc, je ne savais pas qu'on pouvait réussir par les études. N'ayant jamais eu d'exemplarité à cet endroit, tu vois. On entendait, oui, il faut avoir le bac. Et pourquoi ? Même si on a le bac, on n'intégrera jamais les grandes écoles. Passer la barrière périphérique nous paraissait... C'était une barrière infranchissable quasiment. Donc on se cantonnait à réfléchir dans notre giron.
Aujourd'hui, c'est plus pareil. Il y a des gamins de Trappes qui travaillent à la Silicon Valais. Il y en a qui sont chercheurs au CNRS. Il y en a un qui a été capitaine de l'équipe de France. Omar Sy, il a eu un César. Enfin, tu vois, ce que je veux dire... On a compris entre-temps depuis Internet.
Dr. Panichelli : Merci.
Jamel Debbouze : Mais c'est vrai qu'on ne s'autorisait pas à beaucoup de choses. Pourquoi je te disais ça ? Par quoi j'ai commencé ?
Dr. Panichelli : La résilience.
Jamel Debbouze : Oui, mais ça ne me revient plus. J'étais parti sur un truc très intéressant à vous dire. Père philosophique. Oui, c'est trop con, mais ça va me revenir.
Jean-Charles : Est-ce que vous avez un dernier mot que vous voulez nous partager sur l'importance de l'humour ?
Jamel Debbouze : Ça y est, ça revient. Qu'est-ce qu'ils me disent le matin ? Qu'est-ce qu'ils te disent ? Tu as appelé mon banquier ? Non, pas forcément. Oui, je n'étais pas du tout fait pour ça et mon moteur ça a été d'aider ma maman qui était un peu dans la merde.
Et quand elle m'a demandé qu'est-ce qu'il faut, un jour j'ai fait de l'improvisation de Tatra, j'ai trouvé ça génial, j'ai eu envie de continuer et elle m'a dit qu'est-ce qu'il faut pour être comédien, je lui ai dit un micro-cravate, elle a fait un crédit pour un micro-cravate, une cellule MKE40 chez Neiser, je la rappellerai toujours, à 40 000 francs. Elle a fait un crédit de ouf. J'étais obligé de le faire marcher, ce micro. Je te jure. C'est ce micro qui m'a mis la pression. Parce que... Et il n'a jamais marché. Je n'ai jamais utilisé de ma vie.
Tu sais, ça a marché. Mais ma mère avait fait... Elle avait des crédits, tu penses bien. Enfin, c'était pas facile, quoi. Elle s'est chargée en plus. Pour moi, parce que j'ai dit que j'avais envie de... Et là, je me suis senti chargé d'une mission. Je ne pouvais pas la laisser là-dedans. Ce n'était pas possible. Donc par tous les moyens, j'aurais remboursé ce micro. Il s'avère que ça sourit, tu vois. Mais les moteurs ne sont pas importants. Tu vois, on n'est pas forcément chargé d'une vibe artistique. Tu peux aller la chercher, cette vibe. Le plus important, c'est d'avoir un moteur quel qu'il soit. Voilà, c'est ça que je voulais dire.
Dr. Panichelli : Moi, je pensais à un de mes moteurs, c'est aussi les patients qui viennent chez moi les jours où je ne suis pas bien, où je suis malade, je suis fatigué. Jamel Debbouze : C'est vous qui devenez patient.
Dr. Panichelli : Et alors, des fois, je leur ouvre la porte, ils sont déjà en train de rire alors que je n'ai rien dit. Parce qu'ils s'attendent à... à ce que je les a fait marrer. Ce jour-là, je ne suis vraiment pas bien. Je l'ouvre la porte et ils sont en train de me regarder comme si je... Je leur dis, mais attendez, je n'ai encore rien dit. Et quelque part, ça me met dans la bonne humeur de les voir se réjouir de ça. Quand ils me connaissent un peu, ça a bien fonctionné.
Jamel Debbouze : Revenir à la première question, si on devait finir par quelque chose. Il y a des études et pas des études, mais est-ce que le rire est un facteur de bonne santé ? Oui, oui, oui, et oui, et oui. C'est sûr. Et quand, comment on l'utilise ? Bien sûr, il y a un milliard de formes, mais organiquement, moi, ce que ça me procure, et les états dans lesquels ça m'a mis alors que j'étais pas bien.
J'ai une chance extraordinaire d'avoir fait rire et d'avoir laissé cette trace dans la tête des gens quand je suis en voiture par exemple, et que je croche des gens en feu rouge qui me font... Ils n'ont pas le temps de parler, mais ils m'ont reconnu. Ça leur a rappelé un truc marrant. Et ils s'ouvrent et ils sourient. Et ça me fait la même chose. Je vous jure que organiquement, il se passe quelque chose chez moi où je reçois comme ça des capsules de kiff, de bonheur qui me mettent dans un état de kiff et de bonheur. Et j'ai l'impression de mieux vivre, d'être plus serein, en meilleure santé. Et surtout, c'est ce que je transmets.
Dr. Panichelli : Mais oui, qui reconnectent à cette communauté humaine, de bienveillance, d'une équipe dans la vie.
Jamel Debbouze : Ce truc est vertueux. C'est très très dur à aller chercher cet état. La plupart du temps, on fait tous la gueule. Tu mets BFM,
Dr. Panichelli : t'es cuit.
Jamel Debbouze : Tu vois, bon, t'as rien demandé à personne, il y a Bayrou qui est Premier ministre. Bon, on a vraiment le coin à faire avec tout ça.]
Jean-Charles : L'intéressant, c'est que le temps que le podcast soit monté, peut-être que ce ne sera plus le cas.
Jamel Debbouze : Ça sera Rachida Dati. mais ce que je veux dire c'est qu'on est rattrapé tous les jours par quelque chose qui nous saoule tu vois on est des éponges à trucs relous et bien je pense que se forcer à être de bonne humeur se forcer c'est
Jean-Charles : Quelque chose de virtuel c'est sûr moi je crois vraiment à ces prophéties autoréalisatrices de décider de c'est pas facile pour tout le monde et tout le temps mais décider de prendre les situations d'un certain angle ça aide énormément
Jamel Debbouze : De Kersauson il dit des trucs très très très très fort, je trouve. Vous devriez lire Olivier De Kersauson, ce que j'ai découvert il n'y a pas très longtemps. C'est génial tellement c'est limpide de positivité. On est debout, on est vivant. On a nos deux bras, nos deux jambes, pour la plupart d'entre nous. Déjà là, c'est un prétexte extraordinaire pour être heureux. Tu vois ?
Et normalement, tout devrait être pensé comme ça. On réveille. On devrait se rappeler que c'est une extrêmement bonne nouvelle d'être debout, déjà. Et après, t'as le temps de te faire gagner. Mais la bataille, c'est de repousser tous ces trucs négatifs qu'on t'impose. Ceux que tu t'imposes toi, t'imposes toi. Ceux que t'imposes ta famille, à la limite, c'est toi. On n'a pas choisi sa famille. Mais refuser tout le reste. Tout ce que tu peux refuser.
Dr. Panichelli : Dites pour conclure et pour enchaîner sur BMF TV et tout ça. Je suis venu en ayant écrit une petite chanson pour Jamel, moi, alors...
Jean-Charles : Ah ouais ! Alors, va faire !
Dr. Panichelli : Ah, alors là !
Jean-Charles : Tant qu'on y est, on y est,
Dr. Panichelli : c'est parti ! Pour ça, d'abord, j'ai sorti mon matériel, c'est que je vous offre un petit caramel. Il faut écouter la chanson en tenant le caramel.
Jean-Charles : Ah, en le tenant. Ah, c'est parce que je ne voulais pas chanter en me mangeant le caramel.
Jamel Debbouze : Ouais,
Dr. Panichelli : c'est ça, c'est ça, c'est ça. Si vous chantez en vous mangeant, c'est ça. Alors, parce que justement, on parle des journaux parlés où il n'y a que des mauvaises nouvelles, quoi. C'est la guerre, c'est les premiers ministres qui démissionnent. C'est la montée de l'extrême droite, etc. Et puis parfois, pour se détendre, les gens, par exemple, ils vont au Marrakech du rire. Et alors ? Et alors ? Et alors ? Jamel est arrivé ! Sans se stresser !
Jamel Debbouze : Il a une belle voix, hein ?
Dr. Panichelli : Le grand Jamel ! Le beau Jamel ! Avec son flingue ! Ah non, pas avec son flingue, ça c'était dans Adjian. Avec ses feintes et son caramel. Le voilà.
Jamel Debbouze : Yeah !
Remerciements finaux [88:23 - 89:00]
Jean-Charles : Il n'y a pas de meilleure conclusion que ça. Merci. Merci à tous les deux.
Jamel Debbouze : Merci, je suis de bonne humeur.
Jean-Charles : Moi aussi, je me sens bien. Je suis heureux grâce à vous. Merci. Merci Jamel, merci docteur Panichelli. Merci pour le livre
Dr. Panichelli : Avec plaisir aussi.
Jean-Charles : Et j'espère que vous avez compris que l'humour, rire, prendre les situations avec improvisation, légèreté quand il le faut, savoir se concentrer sur ce qu'on peut contrôler font la différence pour notre santé pour notre longévité, donc amenons ça tous autour de nous, on peut être des vecteurs de ça pour les gens qui nous entourent.
Merci à tous et c'est la fin de ce podcast Healthier Humanity qu'on réalise avec Alan pour porter les sujets de santé et de bien-être pour le plus grand nombre. Abonnez-vous si vous voulez suivre les autres, il y a beaucoup d'excellents épisodes qui arrivent bientôt. Merci !
Jamel Debbouze : Celui-là c'est un des meilleurs. Merci. Merci mon pote.