Chez Alan, nous travaillons à ce que chacun puisse influencer activement sa santé physique et mentale. Nous souhaitons apporter davantage de bien-être et une meilleure santé pour tous, en commençant par aider les entreprises à mettre en place les bonnes actions pour le bien-être de leurs salariés, et à équiper chacun avec les bons réflexes
Ce mois-ci, nous avons choisi de parler des sujets liés à la santé des femmes, parce que nous avons le sentiment qu’on a tout à gagner si on les accompagne davantage au quotidien : que ce soit pour leur donner les clés de leur santé, mais aussi aider les entreprises à adresser ces sujets.
Nous avons interviewé Fatoumata Ly, cofondatrice de Ninti, pour mieux comprendre le rôle que peuvent jouer les entreprises dans ces sujets à la fois très personnels, et paradoxalement, avec un impact fort à l’échelle de la société. Comment mieux équiper les équipes RH à aborder ce sujet ?
Un peu de contexte chiffré pour comprendre les enjeux :
Selon Fatoumata, “proposer ponctuellement un atelier en entreprise est positif, mais sans l'engagement complet de son management, de sa gestion et de sa culture d'entreprise autour de cette thématique, l’impact sera faible. “
Les entreprises peuvent agir sur les sujets de la ménopause, de la grossesse ou de la PMA, en communiquant avec leurs collaborateurs et en mettant en place des actions dédiées.
Par exemple, pour informer que la loi autorise certaines absences pour les parcours de PMA et que l'entreprise soutient cette flexibilité. Mentionner que l’entreprise est consciente de la difficulté du parcours, des défis à relever, comme les nécessités des prises de sang matinales ou les interventions médicales, et qu’elle offre son soutien. Reconnaître que le diagnostic d'infertilité peut entraîner une détresse supérieure à la moyenne et proposer des ressources telles que l'accès à un psychologue sont des mesures clés. Ces simples actions de communication peuvent grandement contribuer à offrir un soutien émotionnel aux personnes concernées. L'objectif ensuite sera d'évaluer l'efficacité de ces outils de soutien, pour s'assurer qu'ils répondent bien aux besoins des employés.
Il est essentiel que les managers, et l'entreprise dans son ensemble, mettent en place un cadre de soutien adapté à ces moments.
En accompagnant les entreprises à mieux soutenir les individus dans leurs parcours personnels, Fatoumata confie avoir reçu de nombreux témoignages, comme celui d’une femme ayant subi une interruption de grossesse assez tardive. Elle lui a confié son intention de démissionner, se trouvant dans un état de détresse émotionnelle profonde. Elle se sentait totalement isolée, sans soutien. Pour cette femme comme tant d’autres, à son retour au travail après son interruption de grossesse, les choses ne se sont pas bien passées. La récupération émotionnelle demande du temps, pour retrouver confiance en soi et s'épanouir à nouveau, un temps qui ne lui a pas été accordé. Elle n'a bénéficié d'aucun soutien et n'a pas été reconnue ni entendue par son entreprise ou ses managers. La transition s'est révélée difficile.
Un autre exemple cité par Fatoumata est celui d’un homme, dont le manager avait refusé à ce dernier de prendre un jour de congé pour assister à une ponction ovocytaire de sa compagne. “Pour ceux qui l'ignorent, la ponction est une étape cruciale nécessitant souvent une anesthésie locale et durant laquelle on prélève des ovocytes, impliquant ainsi de passer plusieurs heures à l'hôpital où le nombre d'ovocytes collectés est révélé. C'est un jalon significatif dans le parcours de procréation assistée. Cet homme, suite à ce refus, avait perdu toute motivation au travail, tant cet événement avait été minimisé”. Il est essentiel d'impliquer les hommes, de reconnaître leur souffrance et leur désengagement potentiel face à ces situations. Il s'agit d'un enjeu qui requiert une prise de conscience collective pour mieux soutenir les hommes confrontés à ces épreuves, car ils subissent également les répercussions émotionnelles et psychologiques de ces expériences difficiles..
Preuve que ces sujets ne concernent pas que les femmes, et ont un impact à l’échelle de la société entière. Il faudrait alors des actions concrètes : “Nous avons réalisé qu'il était essentiel d'inverser la tendance : au lieu d'attendre que les personnes s'expriment pour que l'entreprise puisse agir, les entreprises doivent prendre l'initiative de libérer la parole sur ces sujets.”
Pour Fatoumata, “c'est une phase unique de la vie où les personnes endossent la responsabilité d'un autre être humain, et sont souvent en proie à l'isolement pendant la journée. Le congé maternité s'accompagne d'attentes démesurées : gérer seule en journée, et parfois la nuit, puis revenir au travail "comme avant".
De nombreuses femmes expriment vivre des périodes de dépression liées à ce congé maternité, exacerbées par cette sensation d'isolement. Le retour en entreprise est un moment clé, où la société a un rôle crucial à jouer dans la reconnaissance et le soutien de ces phases de vie.
Quelles mesures concrètes peut-on mettre en place ? Au-delà des obligations légales, comme la visite médicale de reprise ?
Après le retour du congé maternité, l’une des proposition de Fatoumata est “un "rendez-vous du sens au travail", allant au-delà du contrôle médical standard pour aborder les bouleversements et les questionnements suite à l'arrivée d'un enfant, et qui pourrait aider l'entreprise à mieux accompagner ses employés dans ces transitions de vie significatives.” D’autant plus que selon plusieurs études, les mères sont souvent d'une grande efficacité, faisant preuve d'une productivité plus élevée malgré les défis personnels (source). Il est important pour l'entreprise de prendre soin de ces femmes, et par extension, de nourrir la culture interne et soutenir l'ensemble des collaborateurs.
Pour Fatoumata, “l'engagement dans un parcours de procréation médicalement assistée (PMA), est un sujet délicat. La loi prévoit des droits et des temps d'absence, mais rares sont ceux qui en discutent avec leur manager, ce qui souligne l'ampleur du tabou. Il revient aux entreprises, par leurs actions, de créer un environnement sécurisant et confiant pour leurs employés, leur permettant de se sentir à l'aise pour en parler ouvertement. Nous avons réalisé que, même au sein des entreprises ayant une approche bienveillante, il est difficile pour les salariés d'aborder ces sujets. “
Il est crucial d'inverser les rôles, l'entreprise devant initier des actions simples pour libérer la parole sur ces sujets. Par exemple, communiquer pour rappeler les droits et les absences prévus par la loi, et engager la conversation au travers d’actions de communication interne, pour démontrer que ces sujets existent et sont reconnus. Faciliter la prise de congés, rappeler les droits et les absences prévus par la loi, former les managers à une approche plus compréhensive : tous ces points peuvent aider.
Environ 3 millions de personnes sont concernées par l'infertilité en France. De nombreuses études ont été réalisées sur la détresse émotionnelle des personnes suivant un parcours d'AMP, illustrant l'impact significatif de ces parcours sur le quotidien des personnes concernées. En ouvrant le dialogue et en partageant les ressources disponibles, les entreprises peuvent encourager leurs employés à parler librement de leur parcours de fertilité s’ils le souhaitent, et s’ouvrir sur leurs difficultés.
Le silence autour de ces sujets ajoute une pression supplémentaire à celle déjà ressentie par les personnes en parcours de fertilité, créant un stress additionnel que l’on pourrait éviter.
Il est dans l'intérêt des entreprises que ces employés restent motivés et engagés, se sentant soutenus. Les études montrent qu'un collaborateur se sentant soutenu durant une période difficile de sa vie est plus engagé et reste plus loyal à l'entreprise, car il perçoit que son employeur l'a aidé à surmonter un moment compliqué, lui offrant ainsi la possibilité d'avoir des absences justifiées, une flexibilité dans son travail, ou parfois d’aménager son poste de travail pour revenir en meilleure forme, plus motivé.
Selon Fatoumata, “cela commence dès la période de diagnostic, qui génère déjà du stress et de l'angoisse. Après le diagnostic, en fonction de la cause identifiée de l'infertilité, un traitement est proposé, pouvant varier selon le type d'infertilité, la situation personnelle et financière. Et lorsqu'on commence les traitements, il n'y a pas de garantie sur le moment où ils fonctionneront. En moyenne, cela peut prendre jusqu'à trois ans pour concevoir. La grossesse ensuite est souvent moins bien vécue, les risques de complications telles que les fausses couches sont augmentés. La période du post-partum s'avère être particulièrement difficile pour celles ayant eu recours à des traitements de fertilité, une période où le soutien est encore plus nécessaire - malgré la perception extérieure que “le plus dur est passé”. “