Le 23 novembre dernier, un groupe de 9 Alaners a passé la matinée au collège Le Village à Trappes, afin d’échanger avec les 160 élèves de 3e sur leurs parcours professionnels. 3 semaines plus tard, 7 élèves du collège venaient à leur tour à Paris pour leur semaine de stage de 3e, organisée par Alan sous la forme d’un “Tech Tour”. Odile Kusnik, qui a mis en place ces initiatives, nous raconte le projet et explique ce qui l’a animée.
Cette initiative est née de nos discussions avec Jamel Debbouze : cela a fait écho à notre volonté, en tant qu’entreprise, d’apporter notre pierre à l’édifice pour l’égalité des chances, la diversité et l’inclusion.
Chez Alan, notre objectif est simple : contribuer à ce que les jeunes issus des milieux populaires soient plus nombreux à accéder à des filières d’excellence. Comment ? En les informant et en apportant notre aide au moment de l'orientation. C'est pour nous une des causes du manque de représentativité, et un point sur lequel nous pouvons agir.
Nous avons donc décidé de participer à la sensibilisation des jeunes sur les formidables opportunités qui se présentent à eux, pour ouvrir leurs horizons sur l’étendue des possibles.
Dans ce domaine, notre première initiative a consisté à intervenir auprès d’un collège. Nous avons commencé avec la ville de Trappes parce que c’est la ville où Jamel a grandi.
Le projet s’est déroulé en deux étapes :
Dédier du temps et de l’énergie à cette initiative m’a paru naturel, parce que cela fait écho à ma propre histoire.
Issue d’une famille défavorisée, 7e d’une fratrie de 9 enfants, il n’était pas évident que je suivrais le parcours qui a été le mien. Mais à chaque étape clé de mon orientation, il s’est trouvé un professeur bienveillant pour me pousser à viser plus haut et m’apporter l’information essentielle pour choisir la bonne direction. C’est ainsi que j’ai quitté ma Guadeloupe natale à 18 ans pour la Métropole, pour intégrer une classe préparatoire puis une grande école d’ingénieur en statistiques, sans me préoccuper des aspects financiers.
L’encouragement et l’information ont vraiment été des moteurs pour débrider mon ambition. Je pense que lorsqu’on grandit dans un milieu où ses parents, ses oncles et tantes et ses voisins vivent des allocations familiales et de petits boulots payés au noir, il était très facile pour la jeune fille que j’étais de croire qu’avoir un vrai travail était déjà une réussite.
Cet encouragement extérieur, que nous adultes pouvons offrir aux jeunes, est d’autant plus essentiel pour casser des schémas mentaux. Lorsque j’ai intégré le lycée général avec le brevet des collèges en poche, une première dans ma famille, une de mes grandes sœurs m’a dit : « De toute façon, avoir des diplômes ne sert à rien, tu seras au chômage comme nous tous ». Et je l’ai crue !
Quelques mois avant le baccalauréat, ma professeure de SVT me demanda à quelles écoles j’allais postuler. Je lui expliquai que j’intégrerais l’université de Pointe-à-Pitre, que j’avais l’ambition d’atteindre le riche statut de professeur de mathématiques. Elle me répondit que je pourrais viser plus haut en préparant les concours d’entrée à l’École normale supérieure (ENS), dont je n’avais jamais entendu parler. Quand elle me dit qu’il faudrait aller en Métropole, j’objectai que mes parents n’en avaient pas les moyens. Cette professeure m’expliqua qu’en plus de la bourse sur critères sociaux, j’avais toutes les chances d’obtenir la bourse d’excellence délivrée par le Conseil Général de Guadeloupe au meilleur élève de chaque lycée.
Elle insista pour que j’envoie un dossier, m'encourageant à me concentrer sur le bac sans me préoccuper des aspects matériels et financiers. Elle eut raison : mon dossier a été accepté en prépa, j’ai eu une place en internat, j’ai décroché la bourse d’excellence, mon billet d’avion a été pris en charge par le Conseil général. Ma mère a encore la coupure de journal France-Antilles, où je figurais en Une à côté des onze autres lauréats du prix d’excellence, tous issus de familles aisées.
En maths spé, lorsque j’ai réalisé que je n’avais plus envie de devenir enseignant-chercheur et que je ne savais pas à quels concours me présenter, mon professeur de mathématiques m’a aidée à traduire en métier la façon dont j’imaginais mon quotidien professionnel : « En fait tu voudrais être statisticien ou actuaire ! » Ce fut une révélation ! Après bientôt 20 ans de carrière, j’adore toujours autant mon métier.
C’est pourquoi contribuer à ce que chaque jeune ait l’opportunité d’exprimer son plein potentiel quel que soit le statut social de ses parents me tient particulièrement à cœur. Chaque jeune doit pouvoir saisir toutes les chances que lui offre l’école de la République, qu’il avance dans sa scolarité avec la conviction qu’il peut faire n’importe quel métier, intégrer n’importe quelle école prestigieuse, à la seule condition qu’il travaille dur et qu’il réussisse les épreuves de sélection. Il y aura toujours une solution pour que l’argent ne soit pas un frein.
Nous avons défini le format de l'expérience avec l’équipe pédagogique pour que l’information bénéficie à toutes les classes de 3e. Après notre intervention au collège, les professeurs ont échangé avec leurs élèves et nous ont fait un retour. Le bilan était très positif, les élèves étaient enthousiastes.
Écouter le parcours de personnes issues du même milieu qu’eux a eu un impact sur leur motivation. Et puis, les élèves ont été enchantés de voir une star issue de leur ville venir leur parler d’avenir. Le discours de remotivation de Jamel a été très convaincant.
Concernant le stage, le bilan est très satisfaisant, à en croire les réactions des élèves. Pour citer une élève à la fin de la journée chez Alan : « Toutes ces présentations m’ont donné des idées de métier. »
Chez Alan, nous réfléchissons à pérenniser ce type d'initiative. En tant qu’entreprise, on peut vraiment apporter notre pierre à l’édifice en complément des actions d’associations comme Article 1 ou de programmes de Grandes écoles. Et je crois profondément que chacun peut s’impliquer à son niveau, ne serait-ce qu’en parlant de son métier, ou en disant à un jeune qu’il peut y arriver. Parce que parfois, cela ne tient qu’à un encouragement.