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Manager et encadrer aujourd'hui : rêve ou désillusion ? Le récap de l’événement Baromètre Alan

Manager et encadrer aujourd'hui : rêve ou désillusion ? Le récap de l’événement Baromètre Alan
Mis à jour le
26 février 2024
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26 février 2024
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À l’occasion de la publication de notre dernier baromètre consacré au bien-être mental en entreprise, nous avons convié 4 experts lors d’une table ronde pour mieux comprendre les nouveaux enjeux de la fonction managériale. Objectif ? Cerner les difficultés actuelles des managers (1 Français sur 2 trouve que la fonction managériale est plus difficile à exercer aujourd’hui que par le passé) et la crise d’attractivité du statut (1 salarié non-encadrant sur 3 souhaite manager à l'avenir).

Lors de cet échange, 5 pistes ont émergé pour changer la donne.

Description des intervenants de l'event et lien du replay

“Les managers sont aux premières loges pour morfler un maximum” : les causes du malaise managérial

Le rôle des managers apparaît comme particulièrement central pour le bien-être mental des salariés alors que 88 % des salariés considèrent que leur employeur est responsable de leur bien-être mental. 

Les enseignements des deux dernières éditions de notre baromètre du bien-être mental en entreprise nous montrent en effet que les managers sont en première ligne car ils font le lien entre la direction et les collaborateurs sur le terrain. Dans un monde du travail où les salariés réclament plus de flexibilité, de reconnaissance et de confiance, le manager cristallise le point cardinal du changement. Chacun attend des managers qu’ils deviennent de véritables “coachs”, maîtrisant à la fois les “soft skills” (savoir encourager, être à l’écoute, être attentif au moral…), et celles inhérentes à leur fonction managériale (encadrer, organiser le travail, communiquer sur les objectifs…). On leur demande même de prévenir les risques psychosociaux (RPS), alors qu’ils sont davantage liés aux difficultés psychologiques que les membres de leur équipe ! En effet, 1 manager sur 2 est angoissé, contre 35 % des non-encadrants, et 41 % d’entre eux se sentent isolés, contre 32 % des non-encadrants.

Peut-on parler de crise managériale ? Pour Jean-Emmanuel Ray, juriste et professeur à l’université Paris I-Panthéon Sorbonne et spécialiste du droit du travail, le désenchantement des managers est à considérer dans un contexte plus large, celui d’un monde du travail en pleine transformation : “Il n’y a pas de contrat de travail sans subordination juridique permanente. C’est son fondement principal. Cependant, il faut se poser la question suivante : cette philosophie est-elle encore adaptée aux salariés et entreprises d’aujourd’hui ? La réponse est non !”. Une profonde mutation du rapport au travail que nous avons d’ailleurs déjà exploré dans la seconde édition de notre baromètre, publié en octobre 2022 : baisse d’importance relative du travail, remise en question du sens de son activité professionnelle et priorisation de l’équilibre de vie et du bien-être mental se sont accélérés post-pandémie.

Selon lui, les managers sont très peu équipés pour faire face à ces changements d’ordre structurel : “Toute la société, et donc les entreprises, était auparavant organisée de façon verticale, sur le modèle du pater familias. Or, les collaborateurs d’aujourd’hui n’ont pas été formatés à cette subordination, contrairement aux générations précédentes. C’est pourquoi les managers dégustent. Nous avons gardé le même système dans un monde qui a entièrement changé. Nous vivons une fin de cycle et les managers, surtout ceux de proximité, sont en première ligne pour morfler un maximum.”.

Pour Jean-Philippe Bouilloud, Docteur en sociologie et spécialiste des problématiques de management et d’organisation, le COVID-19 a sans surprise joué un rôle de d’amplificateur dans ces transformations : “Le rapport au travail a complètement changé. Le télétravail a certes beaucoup d’avantages, mais il pose aussi des questions à un niveau psychosociologique. N’attachant plus le travail à un lieu ou des horaires, il devient par exemple plus difficile de faire la différence entre un manager très impliqué dans son travail d’un manager complètement surmené”.

Vue d'ensemble du petit-déjeuner conférence Alan organisé à l'occasion de la publication des résultats du baromètre Alan x Harris Interactive
Vue d'ensemble du petit-déjeuner conférence Alan organisé à l'occasion de la publication des résultats du baromètre Alan x Harris Interactive

5 pistes pour valoriser et accompagner ses managers

🙋‍♀️ Inciter les femmes à manager

Les chiffres de notre dernier baromètre le prouvent : manager ne fait pas rêver les Français, en particulier les femmes. Trois quarts d’entre elles ne souhaitent pas manager à l’avenir. De plus, parmi les femmes qui sont déjà managers, la moitié d’entre elles n’aspiraient pas à le devenir au début de leur carrière, contre 35 % des hommes.

Il est d’ailleurs intéressant de noter que, paradoxalement, les femmes managers ont tendance à mieux maîtriser leur rôle que leurs homologues masculins : 22 % des hommes managers trouvent qu’il est difficile de concilier leur rôle de manager et leur travail en lui-même, contre seulement 15 % des femmes managers. Par rapport aux hommes managers, elles ont également tendance à privilégier les compétences clées pour encadrer une équipe : par exemple, 44 % des femmes managers apprécient particulièrement d’encourager son équipe, contre 33 % des hommes. Pour les non-encadrants, en plus de compétences liées au statut (organisation du travail, gestion de crise…) les compétences relationnelles sont justement celles qui font de bons managers : 51 % d’entre eux estiment que “savoir encourager, motiver son équipe” est important chez un manager. Mais alors, pourquoi un tel rejet du management chez les femmes alors qu’elles ont moins de difficultés à manager ? En plus de ne pas vouloir sacrifier leur vie personnelle (la seconde édition du baromètre montrait que 40 % des femmes font de leur équilibre vie pro - vie perso une priorité, contre 27 % des hommes), elles souffriraient selon Anne Ruelleux, d’un plus grand manque de légitimité : “Les femmes ne demanderont pas une promotion d’elles-mêmes. Je l’observe fréquemment : une femme va avoir tendance à vouloir cocher toutes les cases d’une fiche de poste pour postuler, un homme se pose beaucoup moins de questions sur ses compétences. C’est pourquoi nous détaillons moins nos offres de poste sur certains critères. Nous incitions nos collaboratrices à postuler pour des postes plus importants afin de les voir évoluer”.

Ce constat sur la légitimité est partagé par Jean-Phillipe Bouilloud : “De nombreuses études ont montré que, lorsqu’elles sont promues, les femmes ont tendance à se poser beaucoup de questions. Cela est bien sûr une force, car cette posture leur permet d’être plus à l’écoute de leur équipe et plus empathiques. Mais les entreprises doivent vraiment leur donner les clés pour oser et se faire davantage confiance.”.

Résultat, la fonction managériale n’attire pas la grande majorité des femmes : près d’une femme non-encadrante sur deux n’a « pas du tout envie » de manager à l’avenir (44 % contre 31 % des hommes). Aussi, seulement 19 % des femmes managers se disent « très satisfaites » de la reconnaissance de leur équipe, contre 27 % des hommes managers selon la dernière édition de notre baromètre.

⚖️ Former ses managers sur le plan juridique

En plus des défis inédits liés à la transformation du monde du travail, les managers se sentent isolés sur le plan juridique et démunis face à un droit du travail qu’ils ne comprennent pas : “Le droit du travail fait peur aux managers. Pourtant, si on veut être un manager crédible, il faut au moins en connaître les bases car le droit envahit tout.” affirme Jean-Emmanuel Ray.

En effet, les procédures concernant les cadres sont de plus en plus fréquentes. Jean-Emmanuel Ray rappelait d’ailleurs qu’un cadre sur trois licenciés pour motif personnel va aux prud’hommes. Les managers perçoivent le droit comme une charge de plus à prendre en compte, voire une menace, d’autant plus que leur responsabilité personnelle est directement engagée (pas celle de l’entreprise).

Par conséquent, selon le juriste, il y a urgence à rassurer leurs managers sur le terrain juridique. L’employeur doit leur garantir un accompagnement et la prise en charge leurs frais juridiques. Aussi, “il faut leur donner les connaissances minimales en droit, afin de leur éviter des erreurs qui les décrédibiliseront, et leur donner les bons réflexes”. Pour des enjeux juridiques et réputationnels, l’employeur doit former ses managers sur trois thèmes principaux selon Jean-Emmanuel Ray :

  • La discrimination (syndicale, hommes - femmes…)
  • Le harcèlement moral et sexuel
  • Les risques psychosociaux (RPS)
Intervention de Jean-Emmanuel Ray pendant le petit-déjeuner conférence Alan
Intervention de Jean-Emmanuel Ray pendant le petit-déjeuner conférence Alan

💬 Créer des espaces d’écoute et de formation 

Nous l’avons vu, les managers sont davantage touchés par les difficultés psychologiques. Pour Jean-Philippe Bouilloud, ils sont obligés de faire le filtre entre les collaborateurs et la direction, mais “ne disposent d’aucun lieu d’écoute pour faire part de leurs difficultés”. Il note aussi le faible niveau de syndicalisation des cadres qui empêche un éclairage suffisant des problèmes propre à leur fonction.

Pour remédier à ce manque de “tiers-lieu”, dédié aux managers et sans pression hiérarchique, il recommande la création d’espaces ou de collectifs dans lesquels ils pourraient dialoguer entre eux, être écoutés et soutenus. “Ce type d’initiative existe dans certains grands groupes mais cela reste peu répandu. Or, ces espaces sont importants pour soulager la solitude des cadres. Ils ont besoin d’échanger hors hiérarchie des difficultés qu’ils rencontrent”.

Anne Ruelleux, Directrice du recrutement chez Capgemini, plébiscite ces espaces ainsi que la création de formations dédiées aux managers. L’enjeu est notamment de les former dans un contexte de travail hybride : “Nous avons notamment mis en place un système de formations entre pairs ainsi qu’un programme de co-développement entre managers et RRH, auquel je crois beaucoup. Nous formons également nos managers au feedback et à se montrer ouverts au ressenti de leur équipe. Cela libère la parole et c’est essentiel”.

Paul Sauveplane, Chief Corporate et People Officer chez Alan, va dans le même sens : “La communication doit circuler, c’est une nécessité. En plus de ces espaces de discussion, il faut également donner la possibilité aux personnes d’être reconnues dans leur travail. Chez Alan, nous mesurons dans nos grilles d’évaluation un critère que nous appelons “Team Growth”. Il nous permet d’évaluer l’impact de chaque collaborateur sur la croissance de son équipe. C’est un critère d’évaluation qui va bien au-delà des compétences techniques de chacun”. Un critère similaire a été mis en place chez Capgemini : “Nous formons tous nos profils de managers, qu’ils soient junior ou non, à la posture managériale et à notre modèle de leadership. Nous les évaluons aussi avec un critère particulier : “Talent Magnet”. Il mesure la capacité des managers à attirer de nouveaux collaborateurs et à les faire grandir. Pour cela, ils doivent nécessairement être dans l’écoute et mobiliser leurs soft skills”.

Ces initiatives vont dans le sens d’une prise en compte des difficultés des managers à un niveau organisationnel, ce qui essentiel pour Jean-Philippe Bouilloud. Il considère que, pour réellement aider les managers, c’est toute l’entreprise qui doit changer : “Le manager n’est pas toute l’organisation. Même s’il possède une marge de manœuvre, l’entreprise doit mener une réflexion globale sur son organisation en elle-même. Il est capital d’en parler et de réfléchir collectivement au système de management que l’on souhaite”. 

🤹 Redistribuer les responsabilités

Selon notre baromètre, parmi les principales difficultés des managers, ces derniers identifient surtout des problèmes d’ordre organisationnel. 28 % des managers éprouvent des difficultés à recruter et 18 % ont du mal à gérer la charge de travail demandée. Évaluer cette charge, tout en exécutant les attentes de la hiérarchie, est donc l’une des tâches managériales les plus difficiles pour eux.

Pour Jean-Phillipe Bouilloud, en devenant manager, certains collaborateurs ne trouvent plus la même satisfaction dans leur travail. Pris en étaux entre les attentes de leur hiérarchie et celles des collaborateurs, les managers sont susceptibles de rentrer dans “une spirale de dévalorisation de son travail et de soi, car le travail bien fait est un support d’identité”. Il ajoute : “Tout métier possède ses propres critères de qualité. Si nous n’avons pas la capacité de bien faire notre travail, nous sommes frustrés et cela devient un vrai problème d’identité”.

S’ils sont surchargés par des tâches qui ne concernent pas leur métier ou l’encadrement direct de leur équipe, les managers s’épuisent : “Beaucoup de cadres ont le sentiment de perdre leur temps dans des réunions de coordination inutiles. Quand il devient manager, le travail du collaborateur a moins de contenu car il passe son temps sur des tâches à faible valeur ajoutée. Pour cette raison, de nombreux salariés refusent de devenir managers.”

L’enjeu est donc de repenser le rôle du manager dans sa globalité pour revenir à son essence même : accompagner les collaborateurs. Les tâches classiques du manager peuvent être distribuées à l’ensemble de l’équipe, en favorisant l’autonomie et la prise d’initiatives.

La responsabilité distribuée chez Alan

Alan a, dans cette optique, choisi la mise en place d’un modèle de responsabilité distribuée : “Chaque collaborateur est incité à prendre des initiatives qui auront de l’impact sur toute l’entreprise. Ce système permet à tous nos salariés de prendre des décisions et de les appliquer de façon opérationnelle, sans prise en compte hiérarchique et sans manager”, indique Paul Sauveplane.

Intervenants table ronde : Jean-Emmanuel Ray, Anne Ruelleux (Capgemini), Jean-Philippe Bouilloud et Paul Sauveplane
Intervenants table ronde : Jean-Emmanuel Ray, Anne Ruelleux (Capgemini), Jean-Philippe Bouilloud et Paul Sauveplane

🌱 Dissocier les différents rôles d’encadrement

Entre atteinte des objectifs, croissance de leur équipe et prévention des risques psychosociaux (RPS), les managers cumulent les casquettes ! Un rôle multitâche particulièrement difficile à appréhender pour les jeunes managers : 2 managers de moins de 35 ans sur 3 ont le sentiment de ne pas être à la hauteur, contre 46 % de l’ensemble des managers. De plus, un quart des jeunes managers a du mal à concilier le rôle de manager avec le travail en lui-même et à organiser le travail au sein de leur équipe. À titre de comparaison, ces difficultés ne sont citées que par 16 % et 14 % des managers de plus de 35 ans, toujours selon notre baromètre.

Pour les aider et favoriser le bien-être et la progression des salariés, il peut être intéressant de dissocier la partie “métier” de la partie “coaching”. En effet, il peut être très dur pour les managers de démontrer leur expertise technique (propre aux métiers qu’ils encadrent), tout en étant capables de mentorer, d’encourager et de repérer les éventuels signes de mal-être de leurs collaborateurs.

Certaines entreprises proposent à leurs salariés d’avoir un manager et un coach, comme Capgemini. “Chaque collaborateur est suivi par un career manager formé, qui n’est pas son manager direct et qui veille à sa progression”, précise Anne Ruelleux. 

Le coaching chez Alan

Alan a également mis en place un système de coaching : “C’est l’un des piliers de notre culture d’entreprise. Nous n’avons pas de manager au sens classique du terme, qui serait dans une position de contrôle ou de validation permanente. Mais tous les Alaners dispose d’un coach, à l’écoute de leurs envies et capacités. Ce système nous permet, en tant qu’entreprise, de consacrer autant de moyens à la progression des salariés qu’à leur bien-être.”.

Publié le 22/05/2023

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